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Économie - Énergie

La Cop 28 aux Emirats : le symbole d’un monde qui change

Le Dialogue

Le ministre d'État des Émirats arabes unis et PDG de la compagnie pétrolière nationale d'Abou Dhabi (ADNOC), le sultan Ahmed al-Jaber, s'adresse au public lors de la séance d'ouverture du Forum mondial de l'énergie du Conseil de l'Atlantique, dans la capitale Abou Dhabi, le 14 janvier , 2023. Al-Jaber, président des pourparlers sur le climat de la COP28 de cette année, qui dirige l'une des plus grandes compagnies pétrolières au monde, a déclaré que les combustibles fossiles moins polluants continueraient de faire partie du bouquet énergétique, aux côtés des énergies renouvelables et d'autres solutions. (Photo de Karim SAHIB / AFP)

 

Les Émirats arabes unis vont organiser la prochaine COP sur le climat du 30 novembre au 12 décembre prochain. Ce choix qui est hautement politique et également pragmatique compte tenu des avancées spectaculaires dans le domaine de l’environnement et des énergies renouvelables. Ce prochain sommet sur le climat reflète avant tout l’essor d’un nouveau monde encré dans le XIXe siècle. 

 

L’obtention de la Cop 28 par les Emirats arabes unis a fait couler beaucoup d’encre. Pour certains, il est impensable qu’un pays pétrolier puisse organiser un sommet sur le climat, mais au regard de sa politique environnementale audacieuse depuis plusieurs décennies, Abou Dhabi a bel et bien les épaules pour diriger un tel évènement.

Oui, les Emirats sont le septième producteur mondial de l’or noir avec une production moyenne de 3,79 millions de barils par jour, mais est-ce incompatible avec la volonté d’insuffler une nouvelle dynamique respectueuse de l’environnement ? Jusqu’à preuve du contraire, nos économies sont en grande partie dépendante du pétrole et des autres matières premières, la guerre en Ukraine en est un bon exemple. Mais la politique émirienne est loin d’être mono-sectorielle. Le pays s’implique depuis plusieurs décennies dans une démarche évolutive et constructive en faveur de la planète. 

 

Une politique environnementale qui ne date pas d’hier

18 ans après leur indépendance, les Emirats ont ratifié en 1989 la convention de Vienne sur la protection de la couche d’ozone ainsi que la convention de Montréal. En 1995 ils rejoignent la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, en 2005 ils ratifient le protocole de Kyoto qui vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre. En 2009, ils deviennent membre permanent de l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) dont le siège se situe à Abou Dhabi. Cette organisation intergouvernementale rassemble pas moins de 167 Etats et l’Union européenne et prône une coopération multisectorielle pour répondre à l’urgence climatique. En 2015, les Emirats signent les Accords de Paris dont l’objectif principal est de maintenir l'augmentation de la température moyenne de la planète bien en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels. C’est le premier pays du Moyen-Orient à l’avoir ratifié. 

Conscient que la cause climatique n’est pas un sujet secondaire, les Emirats ont organisé en 2019 une réunion sur le climat réunissant plus de 1000 diplomates, chefs d’entreprises, experts et chercheurs. Le but était de consolider les acquis des Accords de Paris. En 2021, le pays a organisé un dialogue régional sur le climat pour discuter avec les différents partenaires du Moyen-Orient ainsi qu’avec les Etats-Unis pour être porteur d’une nouvelle dynamique. Ils mettent l’accent sur les investissements dans les énergies renouvelables, les approches écosystémiques, les solutions basées sur la nature, l'agriculture intelligente face au climat, les technologies de capture du carbone et d'autres solutions à faible émission qui soutiendront une croissance économique durable et la création de nouveaux emplois. La même année, les Emirats ont également participé au sommet des dirigeants sur le climat, organisé par l’administration Biden. 

 

Des actions concrètes

Indépendamment de la participation à ces nombreux sommets, les Emirats arabes unis ont annoncé en octobre 2021 « une initiative nationale visant à atteindre des émissions nettes nulles d'ici 2050 », se targuant de devenir ainsi « la première nation du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord à y parvenir ».

De manière concrète, les Emirats arabes unis ont mis en service la plus grande ferme solaire au monde à 35km d’Abou Dhabi. Cette installation photovoltaïque d’Al-Dhafra a été conçue par le Français d’EDF Renouvelables, le Chinois Jinko Power. Les deux leaders dans l'énergie verte sont chacun actionnaires à hauteur de 20 %, le restant est partagé entre les Émiratis Taqa et Masdar. Le projet a débuté en 2020 et sera fini d’ici l’été 2023. Il pourra ainsi fournir de l'électricité propre à 160 000 foyers et évitera le rejet de 2,4 millions de tonnes de CO2 chaque année, ce qui équivaut à la consommation de 200 000 voitures. 

De surcroît en 2021. DEWA, le producteur public d’électricité de l’émirat de Dubaï et le conglomérat métallurgique EGA installé dans le pays ont conclu un accord sur la production d’aluminium à partir d’électricité d’origine solaire. Une première mondiale

Les Émirats arabes unis ont également investi plus de 50 milliards de dollars dans le renouvelable à travers plus de 70 pays, et se sont encore engagés à investir plus de 50 milliards supplémentaires dans les énergies propres.

Au-delà de ces investissements, les Emirats pensent et se projettent dans la ville de demain, plus durable, plus saine, moins polluée. Le « Surface Transport Master Plan » d’Abu Dhabi vise à réduire l’utilisation de la voiture personnelle, par l’intermédiaire du développement d’un réseau de transports publics et la création de pistes cyclables et sentiers piétons. Le plan prévoit de surcroît le développement du Personnal Rapid Transit (PRT), une technologie qui fonctionne à l’énergie solaire. Le « Plan Abu Dhabi 2030 », qui concerne le réaménagement des aires urbaines, concentre plusieurs mesures environnementales avec la mise en place d’un parc national, des zones moins densément peuplées, des éco-villages, une « ceinture de sable » pour délimiter les espaces urbains et les espaces naturels. Le projet vise également à limiter l’empiètement des villes sur les dunes.  

A Dubaï, de 2019 à 2021, l’Emirat a planté plus de 200 000 arbres. D’ailleurs, la ville a dévoilé en 2023 le projet d’une piste cyclable géante de 93 km faisant le tour de l’agglomération. Baptisée The Loop, cette infrastructure sera interdite aux voitures. Le même promoteur URB envisage également la mise en place d’un Agri Hub : un espace de 40 hectares destiné à la recherche et à la sensibilisation sur l’écologie. Le tout construit de manière « verte » sans énergie fossile et en réutilisant le biogaz des plantes pour générer de l’énergie. 

Au travers de ces innombrables projets, les Emirats arabes unis prouvent la véracité de leurs intentions. L’ambition est de penser pleinement le monde de l’après pétrole et le pays s’en donne les moyens. Aujourd’hui, ils ont investi dans le commerce, la finance, l'immobilier, le trafic aérien, le tourisme de luxe, les zones franches, les médias, les ports francs, le transit, l'enseignement, la culture, la haute technologie et la recherche scientifique. Ils sont ancrés dans le monde de demain. Et comme l’a précisé Sultan al-Jaber « en tant que président de la COP28, je définirai une feuille de route qui sera inclusive, axée sur les résultats et loin des sentiers battus ».