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Progressisme

L'antiracisme selon les wokes, n'est pas celui qu'imagine l'immense majorité des français

Le Dialogue

Lorsque que l’on défend des causes nobles, il est facile d'obtenir la sympathie du public et d'attirer l'attention de personnes influentes. On bénéficie d'un crédit spontané qui agit comme un bouclier contre les critiques et les oppositions. En se positionnant du côté du « bien », on ouvre toutes les portes et tout semble permis. On obtient même indulgence et impunité.

Dans cette perspective, en se présentant comme un mouvement antiraciste, le wokisme a séduit un large public et s'est rapidement répandu dans toutes les sphères de la société. Après tout, qui s'opposerait au combat contre le racisme ? C'est l'une des causes les plus unificatrices, et c'est une chose positive.

Cependant, il y a un problème majeur ! La lutte contre le racisme dans la version du wokisme, diffère considérablement de ce que la majorité des gens imaginent. L'écart entre l'idée préconçue et la réalité est énorme. En effet, le wokisme détourne les mots et les concepts de leur sens originel, créant ainsi une tromperie. Par manque de connaissance sur le sujet, il est aisé de se faire berner.

Tout d'abord, il est essentiel de comprendre que le wokisme réintroduit le concept de race, un concept que l'on avait auparavant exclu car il était à la base du racisme, impliquant la classification et la hiérarchisation des groupes humains. Selon les partisans du wokisme (les wokes), les races existent, et ils accusent ceux qui s'y opposent d'être les vrais racistes d'aujourd'hui, affirmant qu'ils cherchent à dissimuler et à perpétuer les systèmes d'oppression dont ils bénéficient. Les wokes revendiquent le racialisme en définissant une personne racisée comme une personne victime de discriminations et d'injustices en raison de son appartenance à une race.

Deuxièmement, dans la vision du wokisme, le racisme est qualifié de systémique, c’est-à-dire qu’il est délibérément ancré dans les structures et les mécanismes de la société dans son ensemble. Il serait donc institutionnel, et découlerait d’une construction à la fois sociale et culturelle pérennisant les discriminations, les inégalités et les injustices envers les personnes racisées. Celles-ci sont présentées à la fois comme victimes du système et victimes de l'Homme blanc. Les wokes adoptent une approche victimaire à travers un prisme binaire et manichéen où tout semble inéluctable.

Troisièmement, sans nuance, le wokisme incrimine l’Homme blanc en l’accusant de porter en lui un racisme héréditaire et indéfectible. En s’appuyant sur les événements historiques et particulièrement l’esclavage et le colonialisme, les wokes mettent sur les épaules de l’Homme blanc un fardeau transmissible de génération en génération. Un héritage empoisonné dont nul ne peut se défaire et quelques soient ses actes. Et si l’Homme blanc se défend d’être raciste, c’est une preuve de plus qu’il l’est. Difficile de ne pas être terriblement vexé quand on est un militant antiraciste et que l’on est accusé d’être raciste parce que blanc. Le wokisme insiste sur le caractère raciste de l'histoire occidentale, affirmant que tout a été construit pour renforcer la domination de l'Homme blanc. À ce titre, les wokes critiquent et condamnent tout ce qui a été créé par l'Homme blanc, au risque d'entraîner une régression culturelle et intellectuelle. Ils rejettent les sciences, la culture, les arts, et plus encore, sous prétexte qu'ils portent la marque du racisme historique. Partant du principe que le racisme est institutionnel depuis longtemps, les wokes affirment que l’Homme blanc bénéficient, de facto, de privilèges et cela dès la naissance. Ils demandent à l’Homme blanc de reconnaître ces privilèges, d’avouer son racisme dans le but de l’amener à se repentir. Cette démarche accusatoire connaît un certain succès aux Etats-Unis auprès d’un public cultivé qui se complait dans la culpabilité et affectionne les injonctions racialistes telles que « le silence blanc est violence » ou « si l’on reste silencieux et que l’on ne se prononce pas contre le racisme, c’est que l’on est coupable au même titre que les racistes déclarés ». Cette notion de privilège blanc a été popularisée par Peggy McIntosh, une universitaire américaine militante féministe et antiraciste, dans les années 90. Reconnaître cette notion controversée équivaut aussi à admettre que les minorités ethniques sont intrinsèquement désavantagées dès la naissance. 

Quatrièmement, le wokisme remet en question l'idée de l'égalité entre tous les êtres humains en s'opposant à l'universalisme, rompant ainsi avec l'idéal républicain. Cette considération est certainement la plus grave car elle alimente dangereusement les thèses racistes. Les wokes ne veulent pas en finir avec les discriminations, mais veulent en créer de nouvelles. Des discriminations inversées où l'Homme blanc serait intentionnellement désavantagé et les minorités ethniques favorisées. Étudier les discriminations en vue de les éliminer et d'instaurer l'égalité pour tous est une démarche pleine de sens et d'intérêt. Mais considérer que certains individus aient systématiquement besoin d’une « aide » pour obtenir des résultats, fait le jeu de ceux qui hiérarchisent les groupes humains. Encore une fois, cette hiérarchisation est la base du racisme. Nombreuses sont les personnes issues des minorités ethniques qui n’ont pas envie de donner l’impression de faire partie de quotas, et de se sentir en permanence dans l’obligation de justifier leurs compétences, car la discrimination positive peut jeter le doute et la suspicion. La question du mérite se pose : faut-il mettre fin à la méritocratie ? A première vue, on pourrait penser que la discrimination positive implique l'ajout de nouveaux critères tels que l'origine ethnique et sociale aux critères de sélection traditionnels basés sur la compétence et la légitimité. Cependant, comment éviter que ces nouveaux critères ne prévalent finalement sur les autres ? A titre d’exemples, aux Etats-Unis, plus d’un tiers des étudiants déclarent mentir en prétendant appartenir à une minorité ethnique quand ils candidatent pour entrer à l’université, et les étudiants d’origine asiatique estiment être largement défavorisés par les politiques de discrimination positive. Au nom de quoi, peut-on accepter que certains individus soient défavorisés ? Comment ne pas être frustré et être dans le ressentiment quand on a la certitude de vivre une situation injuste ? C'est le paradoxe de ce nouvel antiracisme : il ne vise pas à mettre fin aux discriminations et aux injustices, mais à les faire subir à ceux qui en auraient bénéficié jusqu'à présent. Difficile de ne pas y voir un aspect revanchard. Enfin, ce nouvel antiracisme enferme les individus dans des catégories binaires, créant une distinction simple entre les racistes d'un côté et les victimes de l'autre. Les wokes n'hésitent pas à généraliser en attribuant des caractéristiques à des groupes humains. Ils essentialisent pour reprendre la terminologie employée en philosophie. Les actions et les comportements ne comptent pas, l’appartenance au groupe ethnique prévaut. La couleur de peau suffit à catégoriser les individus en tant que racistes ou victimes. Heureusement, de nombreuses personnes issues des minorités ethniques ne veulent pas jouer les 'victimes de service', et beaucoup d'individus en ont assez d'être accusés de racisme simplement parce qu'ils sont nés blancs.

Ce nouvel antiracisme divise davantage la société et oppose les individus. Il crée également une ligne de clivage entre ceux qui croient en la responsabilité individuelle, l'engagement par le travail et le libre arbitre, et ceux qui adoptent une démarche victimaire, estimant que la société leur doit réparation en raison des discriminations subies par eux, leurs parents, grands-parents, voire leurs ancêtres lointains.