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Guerre Israël/Hamas

Risque terroriste sur les Jeux Olympiques

Le Dialogue

Des agents de sécurité patrouillent au lever du soleil près des anneaux olympiques installés sur l'esplanade du Trocadéro près de la tour Eiffel suite à la nomination de Paris comme hôte des Jeux olympiques de 2024, le 14 septembre 2017 à Paris. Photo : LUDOVIC MARIN / AFP.

 

Alors que Paris va focaliser l’attention mondiale durant deux semaines l’été prochain, les djihadistes pourraient bien profiter de cette énorme caisse de résonnance médiatique. 

 

C’est un casse-tête pour la police et le comité organisateur : comment sécuriser un événement multi-site dans la durée avec deux millions de touristes attendus dispersés dans toute la région parisienne et les grandes villes (Nice, Marseille, Bordeaux, Nantes) ?

 

De la cérémonie d’ouverture le long de la Seine sur douze kilomètres, au village olympique à Saint-Denis, les possibilités d’action d’éventuels terroristes sont malheureusement nombreuses. Le criminologue Alain Bauer a brisé le tabou sur France 5 affirmant que « la cérémonie d’ouverture des JO à Paris est une folie criminelle », ajoutant qu’« Il n’y a rien du point de vue de la sécurité et de la sûreté des athlètes, des organisateurs et du public qui n’est envisageable sous cette forme-là » (émission C’est dans l’air, 31 mai 2023).

 

D’autant que pour les djihadistes d’Al-Qaida, du Hamas ou de l’État islamique, les raisons d’attaquer la France ne manquent pas à leurs yeux. Faisons le point sur la série de griefs dont ils accablent la France :

 

Premièrement, la France reste le « pays des caricatures » de Mahomet, avec un président Macron qui avait lors de son discours d’hommage à Samuel Paty enfoncé le clou « Nous continuerons, professeur. Nous défendrons la liberté que vous enseigniez si bien et nous porterons la laïcité, nous ne renoncerons pas aux caricatures, même si d’autres reculent » (discours de La Sorbonne, 21 octobre 2020). Les insultes au prophète sont punies de la peine capitale dans des traités de droit sunnite traduits et vendus dans les librairies musulmanes (L’Epitre Ar Risâla de Ibn Abî Zayd Al-Qayrawânî notamment). 

 

 

Deuxièmement, la France a été en pointe pour combattre les mouvements djihadistes qui pourraient frapper. Et il y a beaucoup de chefs djihadistes neutralisés à venger… Entre 2014 et 2023, l’opération Barkhane aurait tué 2800 djihadistes dont des chefs : Abdelmalek Droukdel de l’AQMI et Adnane Walid al-Sahraoui de l’EIGS. Les djihadistes recrutent et s’étendent de plus en plus au Mali, où ils s’épanouissent préparant leurs expéditions vers l’Est au Niger et frappent aussi le Burkina-Faso, le Togo. Au Tchad c’est plutôt Boko Haram qui pose problème, alors que l’État islamique reprend de la vigueur dans la péninsule arabique.  Autant de groupes différents rêvant d’un coup d’éclat médiatique pour se distinguer les uns des autres. Le sentiment anti-français dans certain pays d’Afrique croit, et leurs diasporas en France peuvent être un terreau de recrutement. Incursion dans le flux des immigrés ou réveil de cellules dormantes déjà en Europe, leur « invisibilisation » dans les plus de 400 000 entrées régulières et irrégulières annuelles en France est facile. 

 

Troisièmement, l’épisode de l’interdiction de l’abaya ne passe pas du tout dans l’opinion de beaucoup de musulmans, notamment parmi les salafistes qui portent cette tenue. On a vu surgir des milliers de réactions sur les réseaux sociaux où la France est vouée aux gémonies pour sa forme particulièrement intransigeante de laïcité. La forme républicaine du régime est perçue comme une machine à nier les pratiques musulmanes depuis la loi de 2004 sur les signes religieux à l’école, durement critiquée par les dizaines de prédicateurs fréristes officiant dans les mosquées hexagonales. Dans la doctrine frériste, s’opposer à l’épanouissement de l’islam est un casus belli

 

Quatrièmement, la France a montré ses faiblesses sécuritaires lors des émeutes suivant la mort du chauffard Nahel, avec 260 postes de police et commissariat attaqués et dégradés sans riposte musclée, donnant des ailes aux milliers d’individus dont l’objectif est d’humilier et de « brûler la France ». Les leaders d’opinion de la galaxie frériste ont largement soutenus les émeutiers sur les réseaux sociaux, cela mériterait un article dédié. L’épisode du match Liverpool/Real de Madrid a illustré l’impuissance des forces de l’ordre quand les délinquants agissent en essaim, et que dire des évènements parisiens tel que les feux d’artifice du jour de l’an où les touristes ressortent choqués voyant les scènes d’agression, non médiatisées mais bien réelles. La police n’arrive déjà pas à sécuriser le Champ de Mars, les alentours du Trocadéro et Montmartre en soirée, comment feront-ils l’été prochain ? 

 

Cinquièmement, la guerre à mort entre le Hamas et Israël a déjà des répercussions sur notre sol, avec des juifs menacés de mort dans les bus, les rames de métros et dans la rue (plusieurs cas recensés dès les premiers jours suivant le 7 octobre). Beaucoup d’imâms et de prédicateurs féristes officiant dans des mosquées ayant pignon sur rue, ont toujours défendu le Hamas. Des grandes mairies françaises hissent le drapeau israélien en solidarité avec l’attaque du 7 octobre, ce qui excite encore plus les islamistes hexagonaux y voyant un soutien inconditionnel au gouvernement Netanyahu qui use de méthodes radicales. Priver d’électricité, d’eau et de convois humanitaires les deux millions de gazaouis dont tous ne sont pas des terroristes en puissance, tout en bombardant allègrement des zones très densément peuplées, attise les envies de vengeance des islamistes européens ne pouvant agir que près des zones où ils résident. La Tour Eiffel illuminé du drapeau israélien est un symbole fort, et un point de repère pour les activistes, dont certains se filment déjà sur Tiktok entrain de mimer une rafale de kalashnikov en protestation. 

 

 Les cibles juives ne manquent pas non plus avec 500 synagogues à protéger, en plus des sites olympiques, des domiciles de politiques, maires et journalistes déjà sous protection en ce mois d’octobre. Peut-on compter sur les sociétés de sécurité privées ? Leur recrutement laisse à désirer on l’a vu lors de récents match de football, et leurs personnels ne sont pas armés. La police attire de moins en moins de candidats sachant que la justice donne toujours une présomption de culpabilité au policer qui fait usage de la force face aux délinquants. En septembre 2014, j’avais écrit, dans une étude prospective pour l’institut Wikistrat, qu’une attaque terroriste d’ampleur aurait lieu en France au premier semestre 2015. J’espère me tromper mais le risque sera maximal l’été prochain. 

 

Les scénarios envisageables ? Attaques de véhicules à l’arrêt dans les énormes bouchons provoqués en Ile-de-France. Attaque armée des hôtels des équipes internationales, des zones de restauration, des sorties de stades. Entrées indétectables de djihadistes « low cost » armés de couteaux dans les métros, magasins et restaurants, sites touristiques. 

 

Il nous reste que quelques petits mois pour avoir si le ministère de l’Intérieur est prêt pour cet événement, et s’il parvient à imposer ses conditions sécuritaires aux organisateurs qui semblent planer dans un autre univers mental.