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Monde

Le Front populaire de libération de la Palestine : la branche marxiste de la lutte contre Israël

Le Dialogue

Organisation de la gauche palestinienne, le FPLP est une synthèse entre son essence marxiste-léniniste des années 1970, la pensée panarabe nassérienne et cette lutte contre Israël. Son fondateur, Georges Habache, a pensé un mouvement hybride qui s’adapte au gré des conjonctures en se repositionnant sur l’échiquier régional.  

 

L’histoire du Front de libération de la Palestine (FPLP) est indissociable à celle de son fondateur, Georges Habache (1926-2008). Lors de la première guerre israélo-arabe, sa famille se réfugie à Beyrouth en 1948. Impossible de revenir sur ses terres natales, il s’engage très rapidement en politique et, devient en 1951 l’un des co-fondateurs du Mouvement Nationaliste Arabe, un groupement d’étudiants panarabes et socialistes ou toutes les confessions se côtoient (il est lui-même grec-orthodoxe). L’éphémère République Arabe Unie (1958-1961) donne des espoirs à Georges Habache mais la défaite des armées syriennes et égyptiennes lors de la guerre de six jours en 1967 porte un coup sévère au rêve d’unité arabe. Cet échec cuisant face à Israël va engendrer une refonte intellectuelle et militante qui va pousser Georges Habache à créer le Front populaire de libération de la Palestine en 1967. 

 

Une opposition constante à Yasser Arafat 

Avec Ahmed Jibril, de confession sunnite, et Nayef Hawatmeh, grec-catholique, ils vont créer à Beyrouth en 1967 le Front populaire de libération de la Palestine. Le mouvement se présente comme marxiste et se calque sur la même idéologie que les autres mouvements de libération, avec l’accent mis sur la lutte armée. Sous la houlette de Georges Habache, le FPLP développe un narratif socialiste embrassant la révolution de la société toute entière, en commençant par les camps de réfugiés, les populations arabes et même la société israélienne. La composante marxiste va néanmoins créer une scission avec les autres fondateurs dès 1969. Très rapidement, le mouvement va s’imposer dans le champ politique et militant palestinien.  

 

L’histoire du FPLP est de surcroît liée à celle du Fatah de Yasser Arafat. Les deux groupes n’ont eu de cesse de s’opposer sur le mode opératoire et sur l’idéologie à embrasser pour s’imposer sur l’échiquier socio-politique. Dès les prémices, le FPLP décrit la direction de l’OLP comme « bourgeoise et réactionnaire » et prône ainsi un changement de pouvoir en son sein.  

Georges Habache tente toutefois d’influer la politique de l’OLP et collabore avec au gré de la conjoncture. Après la défaite arabe de 1967, les groupes palestiniens prennent leur quartier en Jordanie. Alors qu’Arafat tente de nouer des liens diplomatiques et de sanctuariser des alliances militaires pour l’envoi d’armes, les mouvances marxistes à l’instar du FPLP de Habache et du Front démocratique pour la libération de la Palestine (FDLP) de Hawatmeh sont quant à elles chargées de commettre des attentats, en Israël ou à l’extérieur, y compris contre les pays arabes jugés pro-occidentaux. Les actions du FPLP en Jordanie vont entraîner Septembre noir en 1970 car c’est le mouvement qui planifie la double tentative d’assassiner du roi Hussein de Jordanie, qui engendre la terrible répression des Palestiniens et leur exil vers le Liban. Cet évènement contraint Arafat à s’engager dans des opérations dans le royaume hachémite et met fin au financement de l’OLP par plusieurs pays arabes. C’est donc dans ce contexte que les deux groupes palestiniens consomment leur divorce. 

 

Un parti qui se rapproche des islamistes  

Les dissensions entre Arafat et Habache perdurent avec le temps. Les modes d’action, de stratégie, les différentes alliances ou rapprochements (avec l’Égypte ou la Jordanie, jugée trop proches des Etats-Unis et donc d’Israël) traduisent de profondes divergences, en Palestine, en Jordanie et au Liban en particulier. A la suite des attentats et des détournements d’avions pratiqués par le FPLP, le Liban condamne en effet le mouvement dans la crainte de représailles israéliennes. C'est à ce moment qu'il dénonce la coopération avec les gouvernements arabes, lançant ses fameux slogans : " La route de Tel-Aviv passe par Amman et Beyrouth ". Le FPLP prend un temps ses quartiers à Damas, à Tripoli ou à Bagdad, mais ses actions le rendent de moins en moins défendable. Habache s’oppose farouchement à toute compromis avec l’ennemi ou même toute négociation allant dans ce sens. Il se retire du conseil exécutif de l’OLP en 1974 et constitue la même année un « front du refus » à l’égard de Yasser Arafat. 

 

Le FPLP participe à de nombreuses actions contre les intérêts occidentaux et israéliens dans le monde. Israël accuse le mouvement d’Habache d'avoir commandité l'attentat à l'aéroport de Lod-Tel Aviv, commis en 1972 par trois terroristes japonais (vingt-six morts), d'avoir ordonné l'attaque contre des passagers d'El Al à Orly en 1978 (deux morts, dont un policier français), puis l'attentat contre la synagogue de la rue Copernic, à Paris en 1980 (deux morts, soixante-dix blessés). Le plus célèbre fait d’armes du mouvement reste celui de 1976 lors duquel un vol Tel Aviv-Paris d'Air France est détourné avec l’aide des Cellules révolutionnaires, proches de la « bande à Baader ». Environ 240 personnes sont alors retenues en otage en Ouganda. Les forces spéciales israéliennes conduisent le raid d'Entebbe pour les libérer. Le frère de l’actuel Premier ministre israélien Yonathan Netanyahou trouve la mort durant les combats. En Europe, plusieurs groupes radicaux d’extrême gauche responsables de plusieurs attentats en Allemagne ne cachent pas leur soutien au FPLP au nom de la lutte anti-impérialiste. 

 
Habache rejoint l’opposition à Arafat de manière définitive après la signature des accords d’Oslo en 1993. Pour lui ces accords marginalisent les réfugiés palestiniens. Malgré sa démission en 2000, le mouvement continue d’être actif à Gaza et en Cisjordanie sur le plan militaire par le biais des brigades d'Abou Ali Mustafa, du nom de son secrétaire général tué par Israël en 2001.  

Même si le FPLP a perdu de son influence après la chute de l’union soviétique, le mouvement reste un parti d’opposition contre le Fatah de Mahmoud Abbas qu’il juge corrompu et à la botte des autorités israéliennes. Compte tenu de l’islamisation rampante des mouvements palestiniens, le Front populaire de de libération de la Palestine s’est adapté à une nouvelle donne géopolitique en se rapprochant du Hamas, du Jihad islamique et du Hezbollah, le tout avec un regard tutélaire de la Syrie et de l’Iran. Le groupe a en effet participé à l’offensive « déluge al-Aqsa » du 7 octobre aux côtés des différents groupes islamistes.