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Monde

Après un an de guerre en Ukraine, les occidentaux isolés dans leur croisade antirusse

Le Dialogue

Il y a un an, la guerre commençait en Ukraine et, aujourd’hui, on peut clairement affirmer que la volonté des occidentaux d’isoler la Russie et de mettre son économie à genoux a non seulement échoué mais que cette guerre a mis cruellement en évidence la perte d’influence du monde occidental. C’est ce que constate le Washington Post dans un article du 22 février 2023, étiqueté « Breaking News » et intitulé : « A global divide on the Ukraine war is deepening, Russia capitalizes on disillusionment with the United States to win sympathy in the Global South ».

Seulement 34 pays sur 195 soit (17%) appliquent les sanctions contre la Russie. Bien plus, la Chine, l’Inde, l’Afrique du Sud, la majorité des pays du Moyen-Orient et d’Afrique ainsi que pratiquement tous les pays musulmans ont renforcé leur coopération avec la Russie. 

Plusieurs raisons majeures citées par Vladimir Poutine dans son récent discours ont été reçues favorablement dans ces pays alors que celui de Biden en Pologne a été accueilli avec des ricanements dans ces régions.

Le discours de Biden selon lequel la lutte contre la Russie est un impératif moral car l’agression russe bafoue les principes de démocratie et d’intégrité territoriale qui fondent l’ordre mondial « n’est pas un argument que les gens sérieux achètent » déclare l’ancien ministre des affaires étrangères indien, Kanwal Sibal, au Washington Post. Et de citer les bombardements de l’OTAN en Serbie, le soutien des États-Unis aux dictatures pendant la guerre froide et la guerre en Irak comme exemples de la violation de ces mêmes principes par les États-Unis. « Le reste du monde voit vraiment cela comme une guerre européenne, ils ne voient pas un conflit mondial ni de la façon dont il est présenté par l’Occident », a-t-il déclaré. 

Par ailleurs, tous ces pays subissent l’inflation mais en attribuent la responsabilité aux sanctions occidentales et non pas à Russie. 

Bien plus, le fait que la Russie n’ait pas participé à la colonisation de l’Afrique, et que l’Union soviétique ait soutenu de nombreux mouvements de libération du continent sont des points qui ont été exploités par Poutine dans son message, et qui sont bien accueillis en Afrique. 

Arrêtons-nous sur les positions de l’Inde et de l’Afrique du Sud qui irritent au plus haut point Washington. L ’Inde, dont les Etats-Unis rêvaient d’en faire le contre-poids à la montée en puissance de la Chine, s’est rangée ouvertement dans le camp de la Russie parce que c’est son intérêt stratégique. Delhi dépend de la Russie pour son approvisionnement militaire et Poutine lui a offert la possibilité de contenir l’inflation en achetant du pétrole russe à prix réduit. Son commerce avec la Russie a ainsi augmenté de 400% depuis le 24 février dernier. Après avoir essayé de faire changer l’Inde par des pressions de toutes sortes, les Etats-Unis se sont résignés à ne pas la sanctionner.

La décision de l’Afrique du Sud de participer cette semaine à des exercices navals avec la Russie et la Chine a irrité bien plus violement encore Washington. Les Etats-Unis sont en effet, le plus grand investisseur étranger en Afrique du Sud après l’apartheid et le plus grand marché d’exportation de l’Afrique du Sud. Les diplomates américains considèrent que la nature de l’exercice montre que l’Afrique du Sud se range clairement du côté de la Russie. En effet, les exercices Russie-Chine, qui ont commencé vendredi dernier, impliquent des capacités navales offensives et la force russe comprend l’un des principaux navires de guerre, l’amiral Gorchtkov, qui, selon la Russie, est équipé de son nouveau missile hypersonique Zircon. Mais les diplomates américains ont la mémoire courte. L’Afrique du Sud a ses propres raisons de rester fidèle à la Russie malgré les risques, disent les Sud-Africains. Le parti au pouvoir du Congrès national africain a été soutenu par l’Union soviétique tout au long des décennies qu’il a passées en exil pendant l’époque de l’apartheid, et beaucoup de ses plus hauts dirigeants ont reçu une formation en Union soviétique, y compris le puissant ministre de la Défense, Thandi Modise. « Nous ne disons pas que la Russie est bonne en détruisant l’Ukraine, mais si vous nous demandez où nous en sommes dans cette lutte, nous devons être honnêtes. Nous ne pouvons jamais tourner le dos à la Russie. » De son côté, Hakes Matlhong, un jeune Sud-Africain de 33 ans, a déclaré au Washington Post qu’il comprenait mal le conflit, mais qu’il considérait depuis longtemps les États-Unis comme une puissance « impérialiste ». « Et maintenant, la Russie riposte », a-t-il poursuivi. « L’attitude de l’Afrique face à la guerre est que la Russie se défend contre l’OTAN. La Russie n’a jamais participé à aucun colonialisme. La Russie a peut-être tort, mais l’attitude des gens est déterminée par l’histoire. »

Enfin, au Moyen-Orient et dans les pays musulmans, la Russie a réussi à gagner des amis et de l’influence, a déclaré Faysal, un consultant égyptien au Washington Post « Bien sûr, je soutiens Poutine. Il y a longtemps, nous avons perdu confiance en l’Occident. Tous les Arabes de ce côté-ci du monde appuient Poutine, et nous sommes heureux d’apprendre qu’il gagne des terres en Ukraine. »

L’avenir dira si le camp occidental restera soudé durant la seconde année de guerre où s’il se divisera. Pour ma part je vois un risque d’éclatement en trois : le camp anglo-saxons qui mène en même temps une guerre contre l’UE comme l’a montré le sabotage des trois gazoducs de Nord Stream, les pays du Nord de l’Europe les plus déterminés à soutenir cette guerre et les pays du Sud qui sont en première ligne face à l’immigration clandestine, et qui ont de plus en plus de mal à comprendre que l’argent européen coule à flot pour l’Ukraine et l’accueil des ukrainiens et qu’on les laisse en première ligne sans munitions face aux vagues de migrants africains…