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Monde

La Moldavie, maillon faible du limes européen ?

Le Dialogue

La présidente moldave Maia Sandu s'exprime lors d'une conférence de presse après son discours au parlement sur la guerre russe en Ukraine et son impact sur la Moldavie, à Bruxelles le 18 mai 2022. (Photo par JOHN THYS / AFP)

La Présidente moldave Maia Sandu (investie le 24 décembre 2020) a accusé à la mi -février 2023 la Russie de tramer un coup d’Etat à l’encontre de la petite République d’Europe orientale, suite à une transmission de communication des services secrets ukrainiens.

De façon plus anecdotique mais tout aussi révélatrice, la direction de l’Olympique gymnase club de Nice a publié le 3 mars un communiqué déconseillant à ses supporters de se rendre à Chisinau pour assister au match Nice- Sheriff Tiraspol d’Europa Conference League, du fait d’ « un risque sécuritaire latent et non prévisible », appuyée par la Direction nationale de lutte contre le hooliganisme qui considère qu’il n’est pas possible d’envisager sereinement le déplacement des niçois…

La Moldavie est peu connue du grand public. Ex République soviétique de 34 000 km2, historiquement liée à sa grande sœur roumaine avec laquelle elle partage un héritage culturel commun même si l’empreinte russe est bien présente, elle est le pays le plus pauvre d’Europe et a connu à ce titre une émigration massive (8% de la population), ne comptant plus que 2,7 millions d’habitants. Ceux-ci se déclarent à 80% moldaves, 8% ukrainiens, 6% russes, 4% gagaouzes (turcophones christianisés) et 2% roumains.

Structurellement l’économie moldave est fragile. Economie souterraine liée à la criminalité organisée, manque de diversification des activités, grande dépendance aux exportations russes de gaz et pétrole (La Russie a d’ailleurs réduit ses ventes de gaz, entrainant une inflation  de 20%), même si ses vignobles sont réputés.

La corruption n’épargne pas Chisinau, avec un clientélisme et une politisation des fonctions administratives ; la justice est hélas particulièrement déconsidérée…

Le jeu politique voit se succéder au pouvoir comme un système de balance les partis  pro russes (dont l’ancien parti communiste) et pro européens. Ceux-ci sont soucieux de l’intégration à terme au sein de l’Union européenne, et ont pour alliés les pays de l’est membres de l’Union.

Celle-ci a répondu favorablement dans le cadre de sa politique de voisinage et du plan d’action UE-Moldavie, et avec l’ouverture d’une délégation de la Commission dans la capitale moldave.

La guerre en Ukraine suscite à l’évidence une grande inquiétude : la Russie n’a-t-elle pas déclaré que la Moldavie pourrait subir le même sort que cette dernière ? Allant jusqu’à affirmer que Kiev prépare une invasion de la Transnitrie…

Cette région de Moldavie est le catalyseur de toutes les craintes du pouvoir pro- européen de Kichinau. Au moment de la dislocation de l’URSS, elle fait sécession d’avec la Moldavie en 1990, entrainant un bref conflit qui se termine par un cessez le feu signé en juillet 1992, sans résolution politique donc.

Un régime autoritaire dirigé par Edouard Smirnov domine ce territoire de 4 000 km2, soit 11% de la superficie totale du pays, mais plus du tiers du PIB. En effet il détient 36% de l’industrie et 87% de la production d’électricité, sans négliger l’existence de tchernoziom, riches terres  arables. 

Un aspect peu rassurant est l’existence de gros stocks d’armements, faisant de la Transnitrie une plaque tournante du trafic d’armes.

Mais surtout c’est une terre d’implantation russe, ne serait-ce qu’avec la présence depuis l’indépendance moldave 1993 d’un régiment de la 14° armée russe fort de 3000 hommes, soi -disant à titre de force d’interposition. Kichinau n’a jamais tenté de récupérer sa souveraineté, alors même que l’auto proclamée République de Transnitrie n’est reconnue par aucun Etat, y compris la Russie. Cela se comprend aisément car l’armée ne compte que 7500 soldats engagés et 2000   conscrits, avec des équipements obsolètes de type soviétique…

C’est pourquoi à l’instar de l’Ukraine et de la quasi-totalité des Etats d’Eutrope centrale et orientale il demande son intégration à l’Union européenne , par la voix de sa Présidente, qui envisage aussi une adhésion à l’OTAN, pourtant souhaitée que par 30% de la population. Mais les exemples de la Suède et de la Norvège démontrent que l’attitude du Kremlin, loin de tétaniser son voisinage, le pousse à faire ce dont il ne voulait pour rien au monde : s’intégrer à l’Occident ,Europe ou OTAN...