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Économie - Énergie

La neutralité carbone face à la crise mondiale

Le Dialogue

Myriam Maestroni, présidente de la fondation E5T prend la parole lors du rassemblement d'été de l'Union des démocrates écologistes à La Rochelle le 25 août 2016. (Photo : XAVIER LEOTY / AFP)

Cette année, la vision d’un monde neutre en carbone est sans doute plus complexe qu’elle ne l’a jamais été. A la question de la lutte contre le dérèglement climatique vient, en effet s’agréger, avec la guerre russo-ukrainienne, celle d’accroitre notre indépendance et notre souveraineté énergétique, apportant ainsi de nouvelles priorités à la politique énergétique de notre pays et de l’Europe. Cette situation remet notamment au centre du débat l’engagement des « consomm’acteurs » au travers les trois volets de la transition énergétique que sont la sobriété, l’efficacité énergétique des logements, (toujours trop énergétivores et donc trop grands contributeurs aux émissions de CO2) et, bien sûr celle du mix énergétique le mieux optimisé possible. Or en France,  les affrontements technico-économico-politiques concernant le nucléaire peuvent avoir tendance à monopoliser le débat au détriment d’une réflexion globale et qui se doit de conjuguer des actions de court, moyen et long terme en mobilisant les financements et les ressources adaptées. Concernant le troisième volet, l’enjeu est de récupérer et stocker le CO2 à la sortie des usines qui en produisent, ou même en allant le récupérer directement dans l'atmosphère. Ce sujet paraissait complètement surréaliste il y a à peine cinq ans et il fait aujourd'hui partie des solutions du GIEC avec le processus du  « Direct air capture ». Certes, certains préfèrent simplifier le problème de la transition énergétique vers cette neutralité carbone en trouvant une solution un peu miracle dont on entend beaucoup parler dans les médias. Et pourtant, malheureusement, ce n'est qu'en choisissant de bien comprendre comment chacun apporte sa pierre à l'édifice qu'on peut espérer contribuer au résultat final sur un des trois axes particuliers que je viens de citer. 

 

Malgré les catastrophes climatiques naturelles qui augmentent, il y a de l'espoir !

Pourquoi ? Aujourd’hui, il existe au moins 100 scénarios de Net Zéro, c'est-à-dire visant à atteindre la neutralité et le « zéro carbone ». Ces scénarios sont possibles et ont été développés par tout un tas d'organisations très crédibles dans l'Agence Internationale de l’Energie. Or l'AIE a élaboré des scénarios pour 2050. Est-ce que pour autant, nous disposons d’une vision aboutie de ce que sera demain le Net Zéro en Europe, dans le monde et en France ? La réponse est non. Et les tensions géopolitiques actuelles viennent encore peser sur une équation qui contient malheureusement déjà plusieurs inconnues. 

Nous avons vraiment besoin de beaucoup d'ambition, car dans le monde de l'après Covid, on constate que non seulement nous devons faire face à une urgence climatique croissante, mais en plus, nous devons composer avec une nouvelle donne géopolitique extrêmement épineuse et un contexte économique extrêmement sensible. Et pourtant, malgré les crises et malgré les difficultés, plus que jamais, la mission de construire le nouveau paradigme éco énergétique nous incombe à tous, et sans nul doute constitue l'opportunité d'une vie. Je crois que notre immense vulnérabilité d'être humain, dont nous sommes certainement beaucoup plus conscients depuis ces trois dernières années, on en a pris toute la mesure, doit devenir notre principal carburant pour alimenter tout le leadership que nous devons déployer pour faire face à cet énorme défi que suppose la construction de ce nouveau monde. 

Donc la vraie question est de savoir si, malgré les crises, et Dieu sait si ce ne sont pas des petites crises, nous seront en capacité de mettre en œuvre ce nouveau paradigme éco énergétique, qui revêt en fait quatre dimensions : 

-La première dimension, c'est que pour la première fois, on aura l'opportunité de penser la croissance en la décorrélant de la consommation des énergies fossiles grâce justement à tout ce dont on a parlé, développement des énergies renouvelables. La deuxième dimension consiste à prendre en compte les externalités grâce à l'économie circulaire et régénérative. La troisième dimension, ce sont les territoires, c'est le T. Et puis bien sûr, une quatrième dimension qui est l'innovation. L'innovation est sous-jacente aux trois premières dimensions. Mais dans les innovations, il y a notamment la réalité augmentée, la réalité virtuelle au service de l'environnement, les véhicules électriques autonomes. L’entreprise automobile française Renault a récemment créé un moteur sans métaux rares. Il y a aussi l’exemple de la « blockchain », le « data science », « l'open data », « l'internet of things » IOT, les biotechs, la géo ingénierie, l'impression 3D, la robotique, etc. Tout cela montre donc en fait que l’on peut conjuguer lucidité et optimisme, car l'espoir doit toujours nourrir nos travaux. Et notre capacité à pouvoir et à vouloir s'en sortir, en osant regarder vers le haut doit rester permanente comme le montre le film « Don't look up » (Netflix). Il convient de regarder les choses en face, en affrontant avec courage, talent, détermination et beaucoup de cœur ce défi gigantesque que constitue la lutte contre le changement climatique aujourd'hui et la construction d'un monde Net Zéro à venir. Avec ma fondation E5T dédiée à l’enjeu gigantesque de la Transition énergétique, je pense qu’il nous appartient à tous, en Europe comme en Afrique ou ailleurs, d'apporter des réponses, dans le but d’atteindre la neutralité carbone face à la crise économique et climatique mondiale, ou plutôt face aux multiples crises mondiales liées, alimentaire, sociale, migratoire, sécuritaire, comme on le voit tant en Egypte qu’en Afrique noire ou en Amérique latine.