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Économie - Énergie

Énergies renouvelables dans le mix-énergétique

Le Dialogue

Un employé travaille sur des modules solaires photovoltaïques dans une usine à Haian, dans la province orientale du Jiangsu, en Chine, le 15 novembre 2021. Photo : AFP / CHINA OUT

 

Commençons par un paradoxe : tous les experts internationaux sur l'énergie sont d'accord pour dire qu'effectivement, notamment Bloomberg qui dit qu'on va arriver à peu près en 2050 avec un mix énergétique où il y aura… presque 50 % d'énergie sera produite à partir du solaire et de l'éolien. Et actuellement, en France, on est à 3 %. Du coup, il y a effectivement un paradoxe car nous sommes très en retard. 

La question que je me pose est celle-ci : quels sont les freins aujourd'hui du solaire? Pourquoi ça bloque ? Et qu'est-ce qu'on peut faire en tant que citoyen pour enlever ces freins ? Pourquoi ça n'avance pas très très vite en France ? Pourquoi on est quasiment dans les pelotons de queue ? 3 %, on est vraiment dans le peloton de queue des pays. Il y en a qui disent : à quoi ça sert de faire du solaire en France ? On a le nucléaire, on est décarboné, donc pourquoi s'embêter à mettre en concurrence le nucléaire et le solaire ? C'est vraiment un premier point. Après, il y en a qui disent que le solaire, les terres rares, etc. Pourquoi ? C'est polluant le solaire, non ? Après, on dit : oui, mais le solaire, ça permet de créer des emplois en Chine, donc je ne vois pas pourquoi on ferait du solaire, ça n'a pas de sens. Après, il y en a qui disent aussi : oui, mais le solaire… La nuit, on fait comment ? Et puis, le dernier point, ils disent : oui, mais bon, le solaire, vous savez, on a tous entendu autour de nous des gens qui ont des problèmes dans leur entourage, des fuites d'eau, des voisins qui se sont faits arnaqués. Voilà, c'est tous les freins. Sur tous ces freins, il n'y en a vraiment que deux qui sont vraiment réels et sur lesquels il faut se concentrer, c'est les deux derniers. Les trois premiers sont réglés. Le bilan carbone. Le solaire, effectivement, était très carboné dans les premiers temps. Mais aujourd'hui, avec la baisse de l'impact carbone dans la fabrication des panneaux solaires, la technologie a beaucoup progressé. Et avant, effectivement, c'était 200 grammes, (deux carb) de CO2 par kilowattheure. Aujourd'hui, on est à 20. Et dans les années qui viennent, on prévoit d'arriver à dix. On peut dire, de manière assez déterminée, que le solaire est véritablement une des meilleures énergies décarbonées. Ensuite, on dit que c'est un impact écologique contestable. Il n'y a plus de question. Tous ceux qui ont travaillé, qui ont creusé le sujet, aujourd'hui le panneau solaire entièrement recyclable, il n'y a pas de terres rares dans un panneau solaire. Et puis surtout, il n'y a pas de bottleneck, c'est-à-dire qu'on peut en construire beaucoup. La matière première d'un panneau solaire, c'est le silicium. Sous nos pieds, on a 30 kilomètres de croûte terrestre qui est constituée de granite, donc de silicium. Il n'y a pas grand-chose. Le seul petit composant qui pourrait un jour poser problème, c'est peut-être l'argent, mais chaque génération de panneaux en consomme de moins en moins. Donc on pourrait construire 10 000 fois plus de panneaux solaires qu'aujourd'hui sans qu'on ait de problème. Après, ça reste un produit industriel, il n'y a pas de repas gratuit, donc il y a toujours un impact sur l'écologie. Mais c'est, parmi tous les moyens de production, un des plus écolos. Ensuite, la balance commerciale. Un point important, c'est qu'effectivement les gens disent : "Oui, mais pourquoi faire du solaire sachant que ces panneaux viennent de Chine ?" Vous savez pourquoi les panneaux viennent de Chine ? Ce n'est pas un problème de technologie parce que les machines sont européennes. S'ils sont fabriqués en Chine, c'est uniquement parce que les Chinois sont capables d'investir des milliards dans les usines de production qui coûtent… C'est comme pour les microprocesseurs. Pourquoi on ne fait pas de microprocesseurs en Europe ? Parce que ça demande trop d'argent. Ce n'est pas un problème technologique, ce n'est pas un problème de matières premières, c'est un problème de finance. Le jour où la finance aura décidé de faire des panneaux solaires, on pourra faire des panneaux solaires en France moins chers qu'on peut le faire en Chine. Pour finir sur la partie impact négatif de la balance commerciale, sachez qu'aujourd'hui, quand on fait un projet en autoconsommation, à un particulier ou à une entreprise, le panneau solaire ne représente plus que 10 % du prix du projet, au final. 10 %, c'est le reste du matériel. Et 80 % d'un prix d'un projet, c'est la main-d'œuvre locale. Aujourd'hui, un projet solaire crée beaucoup beaucoup d'emplois en France, non délocalisables. C'est un point important parce que ça permet effectivement de pouvoir relancer la machine et, ce qu'on appelle, c'est que l'argent reste à la maison. Les deux problèmes qui restent, et sur lesquels effectivement on a tous la capacité de pouvoir intervenir, c'est le problème de synchronisation offre/demande. Effectivement, le solaire, si vous êtes une entreprise ou un particulier, surtout un particulier, et que vous mettez des panneaux solaires, vous n'allez réduire votre facture que de 20 % parce que vous allez consommer le matin, le soir, et les panneaux solaires vont produire à midi, souvent au moment où vous êtes au boulot. L'idée, c'est d'essayer de voir comment on peut synchroniser l'offre et la demande. La solution la plus simple, ce serait de mettre des batteries. Mais les batteries, ça rajoute un coût qui est très important. Aujourd'hui, la batterie un peu (gomme), ça rajoute à peu près 20 centimes par kilowattheure. EDF vous le vend à 20 centimes. Stocker dans une batterie, ça va vous coûter 20 centimes, plus le coût de fabrication. Donc aujourd'hui, la batterie, ce n'est pas vraiment très intéressant. Par contre, si jamais vous faites fonctionner vos équipements au moment où l'énergie est produite, là vous avez un gain incroyable. Et aujourd'hui, on a la chance en France, on est béni des dieux par rapport à la transition énergétique, c'est qu'on a 15 millions de cumulus qui sont parfaitement pilotables. Il est possible de les allumer, les éteindre et les faire fonctionner au moment où l'énergie solaire est produite. Et vous, ce que vous voulez, c'est de l'eau chaude. Ça vous est égal de savoir si l'eau chaude a été fabriquée le matin, l'après-midi ou la nuit, en heures creuses. Ce que vous voulez, c'est tous les jours de l'eau chaude. Aujourd'hui, en choisissant le moment où le cumulus fait l'eau chaude, vous pouvez avoir de l'eau chaude tous les jours en n'utilisant que des énergies renouvelables. Ce problème-là est en cours d'être réglé. Et le dernier point, c'est un problème de confiance entre les professionnels et les consommateurs d'énergies. Ce que je disais tout à l'heure, c'est qu'effectivement il y a beaucoup de défiance. Il y a beaucoup de gens qui disent : "Mais non, mais le solaire, ce n'est pas sérieux, ce n'est pas une énergie capable de produire de manière industrielle. Il y a tellement de mauvaises références." Je parlais avec Frédéric Mazzella, le fondateur de Blablacar. Il disait : "Nous aussi, on avait un problème de confiance dans les transports." Parce qu'avant, quand les gens faisaient du stop, on mettait le doigt en l'air, et puis des gens qui étaient en voiture disaient : "C'est qui ce gars qui a le doigt en l'air ? Je ne vais pas m'arrêter, c'est sûrement un vagabond, il sent sûrement mauvais, il va me pourrir ma voiture." Et puis, le gars qui fait du stop et puis il voit une voiture s'arrêter. Il se dit : "Oh là là, le mec s'arrête. J'espère que ce n'est pas un tueur en série." Donc il n'y avait pas vraiment de confiance entre le gars qui fait du stop et la personne qui s'arrête. Ce qu'a fait Blablacar, c'est qu'ils ont inventé une application digitale, une plateforme. Ils ont dit : "Vous allez vous inscrire, vous allez mettre votre nom, vous allez mettre votre track record, vous allez enregistrer tous vos trajets et vous allez devenir pas amis, mais presque. Et vous allez monter le niveau de confiance." Ce qui se passe aujourd'hui, Blablacar, incroyablement, a monté en niveau de confiance. Et les gens ont plus confiance en Blablacar, en quelqu'un qu'ils ne connaissent pas, qu'ils ont rencontré sur Blablacar, que leurs voisins. Ils ont fait des tests avec des psychologues sur le prêt des clés de chez soi. Est-ce que vous prêteriez vos clés à quelqu'un que vous ne connaissez pas sur Blablacar ou est-ce que vous prêteriez vos clés à votre voisin ? Et les gens, statistiquement, ont préféré confier leurs clés à un utilisateur Blablacar. Pourquoi je vous dis ça ? C'est qu'on a le même problème dans les énergies renouvelables. Et c'est pour ça que Comwatt, on s'est associé avec pas mal de grandes marques comme Ikea, comme Total, comme EDF, etc. On travaille avec eux pour aider effectivement à créer ce pont de confiance entre une richesse territoriale d'artisans, qui sont très très bons, qui sont excellents, mais qui ne sont pas forcément de très bons vendeurs. Et de l'autre, des millions de gens qui ont envie de faire quelque chose, qui se disent : "Tiens, je ferais bien quelque chose parce que j'en ai marre d'entendre que de mauvaises nouvelles, j'en ai marre de subir des augmentations, j'en ai marre qu'on me reproche mon mode de vie, j'en ai marre qu'on me reproche plein de choses. Je voudrais pouvoir passer à l'action et arrêter de subir." Et ces gens-là ne passent pas à l'action parce qu'ils ont toujours plein de raisons de ne pas passer à l'action, parce qu'ils n'ont pas confiance… Nous, l'idée, notre rêve est de construire cette plateforme… La plateforme existe. On a 30 000 clients qui l'ont déjà utilisée, qui utilisent nos objets connectés pour synchroniser l'offre et la demande. Elle existe, elle a déjà une vraie valeur. Mais 30 000, ce n'est pas grand-chose à l'échelle de la France. Nous, ce qu'on voudrait, c'est 30 millions d'utilisateurs. L'idée, c'est que les gens créent un endroit, comme Blablacar a créé un endroit où les voyageurs se réunissent. Nous voudrions créer cet endroit où tous les gens qui veulent faire quelque chose de concret, et pas uniquement faire de l'air chaud avec sa bouche, mais faire quelque chose concrètement avec son argent, avec son envie, avec sa famille, de créer un projet renouvelable sur sa toiture, et de pouvoir… Dernier point. Aujourd'hui, on est dans une crise. Je pense que la plupart des gens ne comprennent pas ce qui se passe parce qu'actuellement, depuis 20 ans, sur les marchés, l'énergie est vendue à peu près 50 euros le mégawattheure. Et là, pour l'an prochain, une entreprise qui décidera de pouvoir souscrire un contrat pour l'an prochain, on lui propose à 1 000 euros le mégawattheure. Thierry en a parlé un peu tout à l'heure, mais je pense que personne ne se rend compte de l'explosion incroyable de l'énergie. Et pourquoi ? Parce qu'il y a un déficit que vous connaissez à cause effectivement du gaz, un problème lié aux centrales nucléaires. Et aujourd'hui, c'est qu'on n'a pas anticipé le côté synchronisation offre et demande, on n'a pas assez anticipé le côté citoyen, que Donald vient d'évoquer à l'instant. Et les gens vont subir. On va leur dire : "On va vous couper votre énergie, on va couper à Paris pendant deux heures, après on va couper à Lyon pendant deux heures", etc. Alors qu'on aurait pu anticiper. On aurait pu créer des communautés d'énergies, on aurait pu déployer des objets connectés. C'est super idiot, un objet connecté. C'est connecté à Internet, c'est connecté au cumulus. Et plutôt que vous couper le courant, on va juste vous couper votre cumulus pendant deux heures et vous n'allez même pas vous en apercevoir. La technologie est là. Ce qui manque, c'est l'envie. Et ce qui manque, c'est vous et que vous passiez à l'action, tout le monde qui a envie de passer à l'action. Et nous, notre ambition, c'est de créer un moyen simple pour que tout le monde puisse le faire demain. Voilà. Merci à tous et bonne conférence.