Accueil recherche MENU

Culture - Livres - Histoire

Claude Alexandre de Bonneval : un officier français devenu pacha dans l’armée ottomane

Le Dialogue

Après la France et le Saint-Empire, Claude Alexandre de Bonneval est devenu pacha dans l'empire ottoman et s'est converti à l'Islam. 

 

Claude Alexandre de Bonneval est un officier français du XVIIIème siècle. Il est notamment célèbre pour avoir offert ses services au Saint-Empire puis à l’empire Ottoman où il devient pacha*

 

Tourner sa veste est une spécialité de nombreuses personnes. La fidélité n’est pas toujours de mise et c’est ce qui caractérise Claude Alexandre de Bonneval. Après avoir grandi en France, il proposera ses services au prince Eugène, commandant en chef des armées du Saint-Empire romain germanique puis à l’empire ottoman où il changera d’identité et se convertira à l’Islam.

 

Un militaire brillant

Né le 14 juillet 1675, Claude Alexandre de Bonneval grandit dans une vieille famille de la noblesse française du Limousin. A la mort de son père, il est placé dans un collège de jésuites avant d’intégrer la marine à 13 ans grâce au maréchal de Tourville. Après s’être distingué au combat de Dieppe, de La Hougue lors de la guerre de la Ligue d’Augsbourg et de Cadix lors de la guerre de Succession d’France, Bonneval quitte la marine et s’engage dans le régiment des gardes.

A ce titre, il sert en Italie et se fait remarquer à la bataille de Luzzara par le prince Eugène de Savoie, commandant en chef de l’armée autrichienne ayant fait défection à Louis XIV. Bonneval se voit récompenser de ses capacités militaires par le commandement d’un régiment. Malheureusement, les relations avec le ministre de la Guerre sont compliquées et poussent Bonneval à quitter la France craignant d’être arrêté en 1704.

 

Au service de l’Empereur

Il voyage en Italie la même année et se lie d’amitié avec le marquis de Langallerie qui d’ancien lieutenant général de France est passé au service de l’Empereur. Mais Bonneval hésite même si ses chances de rentrer en grâce auprès de la cour à Versailles sont minces. Réflexion faite, il choisit de suivre la voie de Langallerie ; celle de rompre son engagement et de porter les armes contre la France sous la bannière autrichienne. En se souvenant de la bataille de Luzzara, le prince Eugène lui offrit un poste dans l’armée du Saint-Empire. En 1706, il prend part à différentes batailles contre la France ce qui lui permet d’obtenir le grade de général. Il combat également les Ottomans en aidant à la prise d’Alexandrie en Égypte. En 1708, Bonneval reçoit le commandement d’un corps de troupes afin d’intervenir en Italie pour contraindre le pape à reconnaître les possessions de l’archiduc. Charles de Bonneval sera blessé par un des gardiens du pape. Il participe aux batailles contre l’empire Ottoman dont la victoire de Peterwardein en 1716.

À la suite du décès de Louis XIV et la fin des poursuites contre lui, il rentre en France et épouse une fille du maréchal de Biron. Ses relations avec le prince se détériorent et pour cause : il se moque de son entourage. Envoyé aux Pays-Bas, Bonneval montre un caractère particulièrement difficile à supporter et se querelle avec le gouverneur régional. À la suite de propos désobligeants, Bonneval organise une campagne d’affichage contre ledit gouverneur de la province qui est soutenu par le prince. Il se retrouve condamné à la peine de mort pour outrage et injure publique. Malgré l’affection que lui porte l’Empereur, ce dernier aménage sa peine à une année de prison et à l’exil. Désormais sans emploi et sans titre, Bonneval se retrouve à Venise. De là, il prend contact avec l’Empire ottoman pour proposer à ses anciens adversaires ses services en 1730.

 

Au service du sultan

Depuis Venise, il rejoint la Turquie et envoie une lettre au prince Eugène lui notifiant sa décision. Il ôte son chapeau pour le turban, change son identité pour s’appeler Ahmed et se convertit par la même occasion à l’Islam. Bonneval obtient le titre de pacha, titre généralement accordé aux gouverneurs de province. Fort de son prestige militaire, le sultan lui confie le commandement de l’artillerie turc. Ses expériences militaires européennes lui permettent d’apporter un certain nombre de changements stratégiques dans l’armée ottomane. Outre la transmission de la connaissance des bombes et de l’artillerie européenne, son objectif est d’uniformiser l’ensemble des troupes du sultan. Par ses fonctions, il contribue directement à la défaite autrichienne à Niš et au Traité de Belgrade de 1739 par lequel l’Autriche perd des territoires dont une partie du nord de la Bosnie et une partie de la Serbie et sa capitale, Belgrade.

Malgré les succès contre l’Autriche et la Russie, le sultan ne l’autorise pas à accomplir ses désirs d’uniformiser de peur que cela ne favorise des révoltes. Mais, le comportement de Bonneval et son passif ne convainc pas une bonne partie des milieux de pouvoir qui voient en lui une personne peu fiable. A Constantinople, il rencontre des officiers étrangers dont un Viennois avec lequel il entretient de bons rapports. Il est probable que ses contacts l’aient poussé à revenir potentiellement en Europe et à reprendre du service pour la France. Malheureusement, Claude Alexandre de Bonneval décède peu après le 23 mars 1747 à Constantinople d’un accès de goutte avant de pouvoir mettre en œuvre ce retour.

 

 

* Ce texte a été également publié sur le média Billet de France, dont Charles de Blondin est le fondateur et le rédacteur en chef.