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Editos

Le serpent gardien

Zahi Hawas / CRIS
Zahi Hawas / CRIS BOURONCLE - AFP

L’un  des moments les plus  fascinants et mystérieux  de la vie de  l’archéologue  est lorsqu’il lève  le rideau sur une nouvelle  découverte. Lorsque  son regard  tombe sur  une pièce  d’antiquité  qui est  restée  ensevelie dans le sable  pour des millénaires et  qu’il vient  pour la première  fois la dénicher, la mettre au grand jour  et écrire à l’instant  même  une page mémorable du  livre  de l’Histoire. On  avait découvert dans la région  de  Sakarra près des pyramides de Guizèh  deux tombes qui  étaient  restées enfouies  dans le sable. Le jour  même de la découverte,  je m’étais réveillé  de bon matin, avant la levée  du jour et après avoir passé une nuit de rêves  comme  à l’accoutumé,  la veille de l’ouverture  de  chaque nouvelle  sépulture. 

Cette  nouvelle  découverte en a  remonté une autre  dans  mon esprit :  celle de la tombe  du gouverneur des oasis  baharia à l’époque de la vingt sixième dynastie  connue   historiquement  sous le nom de l’époque Sawi. Elle  n’était pas  repérable pour de longues années  pour être enfin  trouvée en dessous de la ville El-Bawiti à l'oasis de Baharia  à  plus de trois cents kilomètres du  Caire.

Le  grand  archéologue égyptien  Ahmed Fakhri est  le seul à avoir  accordé un  grand intérêt à la découverte des antiquités des oasis égyptiens.  Il  y a travaillé pour  réaliser un  grand nombre de  grandes découvertes  dont celle  du "Grand-père de Khansu Yuf Ankh » dans la zone du Temple de Ein Katif, qui remonte à l’époque du Roi Ahmôsis" II " (526-570  avt J.C.)  Ahmed Fakhri a passé en  vain de longues  années pour découvrir la tombe  du  gouverneur des oasis Al  Baharia. En dépit   de  la découverte de  nombreuses fossiles à  quelques mètres de la tombe,  il ne  l’a pas découverte  et la tombe est  restée  longtemps  loin  des regards pour encore cinquante ans jusqu’à  ce  que j’en ai fait, moi-même, la découverte. Une fois  dans la chambre  funéraire, j’ai  découvert  à l’entrée un  petit  trou à travers lequel  j’ai  vu  un sarcophage  sans pareil.  Je me suis  souvenu  le moment où Howard  Carter  a montré, le  4 novembre 1922,  la sépulture de  Toutankhamon et  lorsqu’il a  proféré  ces mots : « De  très belles  choses. C’est splendide »  en réponse  à la question de  Lord  Carnarvon  sur ce  qu’il voyait  à l’intérieur. Je  me suis introduit  dans la chambre  funéraire en  compagnie  de mon  assistant Tarek Al-Awadi  et de mon  équipe.  Nous avons trouvé  sur le couvercle des gravures de paysages représentant les deux déesses protectrices  de l’Egypte antique « Isis » et « Teftis »  et  une représentation  extraordinaire  du dieu des morts « Osiris » Le poids du  couvercle  était d’environ  dix  tonnes en pierre calcaire. C’est  alors que  j’ai décidé  d’ouvrir  le sarcophage  après avoir  fait appel  à Talal  et Ahmed  El-Kreiti,  membres d’une famille spécialisée  dans le maniement  des pierres colossales  et  l’ouverture des sarcophages  fermés. 

Ce qui  est  vraiment étonnant,  c’est  qu’à peine quelques minutes de leur  arrivée aux oasis  Baharia  alors qu’on discutait  des détails de leur  mission,  ils ont  reçu  un télégramme  les avisant  du décès  de  leur frère et  ils sont  rentrés pour  revenir  une semaine plus tard,  On  a commencé  alors à parler  de  la malédiction  du  sarcophage du  gouverneur des oasis.  La veille du  jour  où j’avais décidé  d’ouvrir le  sarcophage,  je  me suis  couché tôt  pour  avoir  une nuit faite de cauchemars où je voyais une fumée  jaune épaisse  qui  enveloppait les  lieux  et un  gros serpent  à l’entrée qui  m’empêchait d’entrer et  il grandissait  jusqu’à  atteindre une taille   jamais  vue, remuait  sa queue et  soufflait le  feu.

Les cauchemars  terrifiants me réveillèrent  que je n’ai pas  pu  me rendormir. Avant la levée  du  jour, nous avons pris tous notre chemin  en direction  de la  tombe du gouverneur des oasis Baharia. Nous nous sommes tous mis à l’œuvre pour soulever le couvercle alors que les travailleurs entonnaient  un chant  traditionnel  d’encouragement qui  commençait par  le salut de Dieu  sur  le prophète  Mohammed ( La paix d’Allah  soit  sur lui). Au  bout de quelques heures  de dur labeur,  la mission a été  accomplie et le sarcophage  ouvert  pour en découvrir un  autre à l’intérieur  en alabastre   et  en l’ouvrant, on  a découvert  la momie du  gouverneur  couverte par des amulettes  dorées  ou  en pierres  précieuses. Et,  nous n’avons jamais trouvé  le  serpent ! De  très beaux   souvenirs qui remontent  en  surface et me font  revivre  ma plus belle découverte celle de  la vallée  des momies dorées  et  la tombe  du   gouverneur des oasis Baharia !!!