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Monde

Riyad et Téhéran: quoi de neuf ?

Le Dialogue

La récente visite effectuée,  le 17 août 2023,  en  Arabie Saoudite  par  le  ministre  iranien  des affaires étrangères Hossein Amir Abdollahian et sa rencontre  avec le prince héritier et premier  ministre Mohammed ben Salmane ben Abdelaziz Al Saoud a  jeté  de nouveau  la lumière  sur le parcours des relations bilatérales entre les deux pays et leurs domaines de coopération  régionale et l’influence  exercée sur la sécurité  régionale en  général.

La reprise des relations entre les deux pays- déclarée à  Pékin, le 10 mars dernier  au  terme de sept années de rupture entamée en 2016-   a constitué  un événement intéressant  en  raison des différends  profonds qui  les opposent qui ne  sont pas uniquement dus à  des facteurs politiques  mais également à  des différences dogmatiques  et au  rôle de  médiation joué par la Chine  qui présentait la preuve probante  de la vitalité  de  la diplomatie et sa réussite  dans  une zone d’influence  américaine. 

Au  cours des mois suivants,  Riyad et Téhéran se sont échangés les visites  pour concorder  au sujet  des arrangements techniques et logistiques  relatifs à la reprise des relations. Les ambassadeurs des deux pays ont présenté  leurs lettres de créance. L’ambassade  iranienne a ouvert ses portes à  Riyad  le 6 juin. En  ce  même mois,  le  ministre saoudien  des affaires étrangères Faisal bin Farhan Al Saud a effectué  une  visite à Téhéran  - la première du  genre depuis dix-sept  ans d’un chef  de diplomatie  saoudienne en  Iran-    et s’est entretenu  avec  son homologue iranien  avant  d’être reçu par  le président de la république. Quant à  l’ambassade  saoudienne à Téhéran, elle a repris son activité   début  août. Certains ont profité  de  ce retard pour  publier des articles et des analyses portant sur  le coup  de froid sur les relations  entre les deux pays, que nombre de problèmes ont émergé et que la reprise des relations n’avancent  pas selon  le calendrier prévu.

La visite du ministre iranien des affaires étrangères en  Arabie Saoudite -  la première  du genre  depuis dix ans-   met les points sur les i  et illustrent que les deux pays  pensent trouver leurs intérêts  dans leur rapprochement  et  une coopération  plus étroite  entre eux.

Le premier round  des entretiens entre les deux   ministres a eu lieu  au  Hall  de la solidarité  musulmane sis au bâtiment du  ministère des affaires étrangères. Y  a prévalu une atmosphère positive   grâce à  la déclaration iranienne de soutien  de la demande  saoudienne d’accueillir  l’Exposition  Universelle 2030. Riyad  fait partie des trois villes phares candidates à son organisation,  avec Rome en Italie et Busan en Corée du Sud. C’est pourquoi, le ministre saoudien  a déclaré  dans la  conférence de presse commune son  appréciation profonde   de  cette déclaration.

Le  ministre saoudien  d’ajouter  que les deux pays sont  mus par la volonté sincère  et sérieuse qui  porte sur la mise en  exécution des clauses de l’accord de la reprise des relations,  vu  qu’il est d’un  grand  intérêt populaire aux deux pays à  travers le renforcement de la confiance réciproque,  l’élargissement de la coopération bilatérale  et l’application   des accords conclus entre eux  dans les domaines de la sécurité,  de l’économie  et du renforcement de  la stabilité  régionale. Il a  mis  l’accent sur le fait  que son  pays aspire à la visite du  président iranien  en  réponse à l’invitation  qui  lui sera adressée  par  le roi Salmane  et  que le président iranien  « sera toujours le  bienvenu en  Arabie  Saoudite ».

L’allocution du  ministre  iranien a dénoté  le soutien  porté aux  idées  formulées par le ministre  saoudien. Il a estimé  que les relations entre les deux pays  sont sur la bonne voie  et  a réaffirmé la détermination  de son pays à  resserrer  les liens de coopération  avec le royaume saoudien, à  activer les accords sécuritaires, économiques et  commerciaux  conclus entre eux.  Il  est à  noter qu’il  a ajouté ici   le terme « commerciaux »  qui pourrait refléter l’intérêt  iranien à  multiplier les échanges commerciaux entre les deux pays. Il  a également  fait référence à  l’accord de  création d’un  certain nombre  de comités ad hoc techniques, présidés par les deux chefs de diplomatie,  pour discuter  de ces questions. Il  a également confirmé  que l’Iran  tend la main  pour coopérer sur le plan bilatéral  ou  multilatéral avec les pays de la région: la preuve en est le développement de ses relations avec  l’Irak, le  Qatar,  le Koweït et les EAU. 

Le lendemain, un deuxième round d’entretiens  a été  tenu à  Djeddah entre l’émir  Mohamed Ben Salmane  et  le ministre iranien  au cours duquel-  comme l’indique le communiqué  officiel  saoudien- « ont été passées en revue les relations entre le Royaume Saoudien  et la République Islamique d’Iran  ainsi que les opportunités prospectives de la coopération bilatérale et les moyens de les développer. En  outre, ont été  discutées les situations  sur les deux champs régional  et international  et  les efforts déployés à  ce sujet ». 

Il  est  donc évident, que Riyad et Téhéran  sont nourris par la volonté politique de développer les relations entre eux aux deux plans  bilatéral  et régional ; le résultat de la visite effectuée par le ministre iranien  des affaires étrangères  en Arabie  Saoudite en  est un indice indubitable. A  cela s’ajoute la publication faite par un média officiel  iranien- jamais déniée par l’Arabie Saoudite-  qu’une entrevue a eu lieu  entre des responsables militaires de l’Arabie  Saoudite et  de l’Iran en  marge de leur participation à  une conférence sur la sécurité à  Moscou. Plus tôt,  ce fut la position saoudienne  d’appui de la reprise par la Syrie de son siège  à la Ligue  Arabe et la revigoration  des efforts diplomatiques  visant la résolution  de la crise au  Yémen et dont le dernier de ses maillons était la visite effectuée,  le 17  août, à Sanaa par une délégation  du  Sultanat d’Oman  pour  discuter avec les Houthis des moyens  de la résorber. 

En contrepartie,  il  existe des questions contestables entre les deux Etats  dont  en premier  lieu le  rôle régional de l’Iran  et  les menaces qui  guettent la sécurité  navale dans le  Golfe et  le différend entre les deux pays au  sujet  du  champ gazier connu  sous le nom de  Dorra au  Koweït  et en Arabie  Saoudite et d'Arash en Iran.

Il  est à  noter qu’au  cours de la  conférence de presse  commune des deux ministres,  les journalistes  furent interdits  de poser des questions. On  ne  voulait ni  discuter des détails des causes et des positions ni  mettre  mal  à l’aise aucune des deux parties.  A  cela s’ajoute que les déclarations des deux ministres étaient  générales et ne signalaient aucun  accord sur des questions bien  précises. Les relations entre l’Arabie  Saoudite et  l’Iran sont au point de  mire de l’intérêt  mondial en  raison  de leur grande  importance au  Moyen-Orient.  L’épisode à  venir sera la précision par  le président  iranien  de  la date de sa  visite en  Arabie Saoudite  et des résultats qui en  découleront.