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Afrique

L’Ombre de Washington plane sur la nomination du Général Kabarebe au poste du Ministre de la coopération du Rwanda

Le Dialogue

Photo d'archive prise le 17 juillet 2005 du chef d'état-major de l'armée rwandaise, le général de brigade James Kabarebe, inspectant à Kigali les troupes rwandaises faisant partie de la force de l'Union africaine, attendant de monter à bord d'un avion qui sera envoyé dans la région occidentale du Darfour, au Soudan. Un juge français a inculpé six proches collaborateurs du président rwandais Paul Kagame dans le cadre d'une enquête sur l'assassinat d'un président rwandais en 1994, a déclaré une source proche de l'enquête le 16 décembre 2010. Les six personnes, dont le ministre rwandais de la Défense James Kabarebe et deux Les généraux rwandais ont été informés des accusations portées contre eux alors qu'ils étaient au Burundi au début du mois et ont été autorisés à rester en liberté, a indiqué la source. Photo : JOSE CENDON / AFP.

 

Contre toute attente, la nomination, du Général James Kabarebe, le 27 septembre dernier, au poste de ministre d’État chargé de la coopération régionale au Rwanda provoque l’émoi au Congo RDC.

De fait, « le choix de Kabarebe montre que le Rwanda veut exclure la RDC de sa vision de la coopération régionale . Le gouvernement rwandais sait très bien que Kinshasa le voit, à tort ou à raison, comme le cerveau de l’implication militaire rwandaise en RDC des années 1990 jusqu’à aujourd’hui » analyse Phil Clark, professeur de politique internationale à la School of Oriental and African Studies (SOAS) de l’université de Londres pour le quotidien (Le Monde, le 2 octobre 2023).

 Et pour cause, en juin 2023, le nom du général avait été cité dans le rapport des experts des Nations unies sur le Congo RDC comme l’un des officiers rwandais impliqués dans des opérations militaires dans la province congolaise du Nord-Kivu ces derniers mois. 

A ce titre ,le rapport de l’Onu, énoncent tout de go que ces opérations visent à « renforcer le M23 en fournissant troupes et matériel, et à les utiliser pour sécuriser le contrôle de sites miniers, gagner de l’influence politique en RDC et décimer les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) », groupe rebelle hutu rwandais initialement formé par d’anciens génocidaires.

Que cela ne tienne, Kigali a toujours rejeté toute accusation de lien avec le M23. « C’est un narratif qui perdure depuis longtemps », dénonçait le 4 juillet 2023 pendant une interview à la télévision nationale le chef de l’État rwandais. « Est-ce que c’est vraiment destiné à régler le problème ? », questionnait-il, pointant le silence de la communauté internationale sur le sort des réfugiés congolais rwandophones installés au Rwanda et la collusion des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) avec les FDLR, groupe qu’il considère comme une menace pour Kigali.

Dans cette perspective, le Professeur Clark ne manque pas de poursuivre, « alors que la RDC voit Kabarebe avec grande suspicion, il maintient des réseaux puissants à travers les Grands Lacs et est respecté sur le continent, non seulement pour son rôle dans la chute de Mobutu, mais aussi pour les différentes missions de maintien de la paix du Rwanda au Mozambique et en Centrafrique ». (Le Monde, le 2 octobre 2023)

 Or l’histoire contemporaine du Congo RDC est très largement méconnue.

Pourtant ce pays d’Afrique centrale regorge d’immenses richesses minières. 

Depuis 1997, en République du Congo, et tout particulièrement dans la région orientale du Kivu, on dénombre 10 millions de morts, 500 000 femmes violées et 110 000 km2 de forêts dévastées par l’exploitation illégales de ressources minières.

Dans ce contexte, on aimerait souligner que depuis 1994, on assiste à l’invasion masquée du Congo par des milices des troupes du très puissant Paul Kagame, le chef de l’État rwandais soutenu au départ par le Président Bill Clinton et ensuite par la France par le Président Sarkozy. 

Paul Kagame, cet homme rude, qui fut formé aux Etats-Unis, sert au mieux les intérêts de Washington en RDC, mais aussi en RCA au Congo-Brazzaville et dans les États d’Afrique centrale, où la guerre entre l’Occident, la Chine et la Russie est assurément féroce pour le contrôle les ressources stratégiques. Insatiables, les prédateurs dépècent la RDC et pillent ses richesses.

Pour mémoire, la guerre du Kivu, a éclaté en 1996 à la suite du soulèvement des Tutsis congolais qu’on appelle les Banyamulengue, instrumentalisés par l’influent Paul Kagame soutenu par les Etats-Unis et les Britanniques. L’Est de la RDC accueillait en outre depuis 1994 de nombreux réfugiés Hutus, fuyant la colère et la vengeance des Tutsis arrivés au pouvoir.

Or à cette époque, régnait encore le Maréchal Mobutu qui, malgré les nombreuses exactions dues à sa tyrannie, demeurait un fidèle allié de la France et surtout un facteur de stabilité.

 

Dans cette perspective, les implications de Washington quant aux massacres de réfugiés par les troupes rwandaise a bien été documenté par Charles Onana dans son livre «  Holocauste au Congo, Omerta de la Communauté Internationale », publié en 2023 chez l’Artilleur. 

Et qui demandera un jour des comptes à Paul Kagame, le protégé des Etats-Unis ?

Washington a toujours nié les faits sur la réalité sur ce sujet, souhaitant préserver à tout prix sa politique et ses intérêts. Et il va sans dire que la nomination du Général Kabarebe a certainement reçu l’aval du Pentagone.

Les guerres passées s’inscrivaient (comme aujourd’hui) dans une rivalité générale américano- française en Afrique. Les Américains avaient ainsi bloqué à l’époque le renouvellement du très francophone Boutros Boutros Ghali au poste de Secrétaire Général des Nations Unies. Enfin, la France, négociant son retour dans le commandement intégré de l’Otan contre la création d’un pilier sud de l’Organisation en Méditerranée, s’est vu infliger au final une méprisante fin de non-recevoir par Washington…