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Ukraine/Russie

Vers un « front du bon sens » ? Des propositions de paix autour du conflit en Ukraine commencent à émerger depuis la société civile et certains politiques européens

Le Dialogue

Si rien n'est fait et sous la forme la plus rationnelle, l'Europe est vouée à subir une catastrophe qui la ramènera soit aux niveaux économiques d'il y a un siècle.., soit à un destin apocalyptique... Pour éviter le pire, une initiative de dialogue est en train de partir d'Italie, organisée par Polis Etica, une École populaire d'éducation civique, et son Centre d'Études DEEEP (Démocratie, Éthique, Éducation, Économie, Politique), qui invite les bonnes volontés du monde, et en particulier de toute l’Europe, à répondre à l’appel à rechercher la paix sur le Continent et à dialoguer spontanément dans le cadre d’un « Front de sens commun » nécessairement transversal qui impliquera l’ensemble de la société et qui résonne comme un écho aux appels incessants à la paix en Ukraine lancés par le président brésilien Ignacio Lula, le diplomate américain Henry Kissinger ou encore le Pape François.

 

Pourquoi une initiative d'Italie ?

Outre l’appel du Pape François à rechercher la paix et le dialogue, certes tout en étant solidaire du peuple ukrainien, l’Italie est le point de départ de l’initiative au dialogue russo-occidental et à la paix en Ukraine parce le « Bel Paese » est la nation européenne qui a subi de plein fouet le plus d’attaques à tous les niveaux depuis les gouvernements « techniques » imposés par Bruxelles, la crise financière de 2007-2008 (Monti, etc), la crise du Covid et bien sûr la guerre en Ukraine, l’Italie étant un des pays les plus stratégiques pour les Etats-Unis et l’OTAN puisqu’elle abrite après la Turquie les plus importantes bases militaires américaines et atlantiques, y compris avec du matériel nucléaire, ce qui rend sa souveraineté géopolitique limitée... Dans ce contexte de contrôle atlantiste de l’Italie, qui a conduit Giorgia Meloni à faire en peu de temps un virage atlantiste à 180 degrés pour pouvoir être adoubée à la tête de l’État par les milieux financiers, européens et américains, le monde de l'information, l’une des cibles privilégiées, n’en est pas resté indemne. Il est vrai que depuis des années, les moyens d’information mainstream, qui sont les plus consultés quotidiennement par la population, ont dû - sauf rares exceptions d’invités singuliers, s’aligner sur les positions gouvernementales, parfois en vertu  d’une "pensée unique" de type orwellienne, et ceci alors même que la censure est interdite dans la Constitution italienne. Ce processus rend difficile pour quiconque d'avoir une voix discordante ou vaut aux récalcitrants d'être discrédités, ce qui empêche la grande majorité de la population de savoir ce qui se passe réellement. 

 

L’évolution du centre-droit italien et du gouvernement Meloni en faveur d’un alignement atlantiste 

Ceux qui ont voté pour le centre-droit italien (Giorgia Meloni, Silvio Berlusconi, Matteo Salvini, etc) le 25 septembre 2022 (en fait moins de la moitié des électeurs italiens) comptaient en fait sur ce qui avait été déclaré pendant des années par tous ses dirigeants, à commencer par Giorgia Meloni, la première femme à devenir Premier ministre, qui fut jadis assez anti-atlantiste et favorable à une paix avec la Russie, mais ils ont eu le sentiment d’avoir été inopinément trahis. Mais pour ceux qui connaissent les motifs et les objectifs politiques de certains épisodes qui ont conduit au revirement très anti-russe et atlantiste du centre-droit italien (rencontres de Mme Meloni à la Maison Blanche avec Joe Biden, et à Bruxelles, avec Von der Leyen, juste avant qu'elle ne soit nommée chef du gouvernement), il était clair que les choses allaient évoluer ainsi et que le positionnement géopolitique allait être littéralement bouleversé. 

Malgré cela, un mouvement de bon sens se fait jour depuis peu, en réaction à cette confiscation politico-électorale, mais de façon constructive, comme on l’a vu le 22 mai en Italie, avec l’initiative pour la paix en Europe lancée par notre mouvement. L’idée qui a déclenché l’évènement pour la paix part du postulat de principe qu’il n'est jamais sage de cacher les implications logiques et finales d’un problème géostratégique grave, car au fur et à mesure que vous évitez de le résoudre, il devient de plus en plus gros, jusqu'à devenir un problème insoluble, puis un désastre ... Or la situation de l'Europe, mais aussi des États-Unis et du reste du soi-disant « Occident », est de plus en plus précaire au point de risquer de nous conduire tous à un effondrement définitif. 

 

Le besoin de rationalité 

À partir de cette analyse et de la volonté de relancer une rationalité aussi nécessaire qu'urgente dans le débat géostratégique, le Centre d'Études de Polis Etica a conçu et créé une initiative qui pourrait donner lieu à une réaction constructive et unanime au niveau paneuropéen. Le sommet qui s'est tenu le 22 mai 2023 a réuni un premier groupe de quatre représentants de la politique institutionnelle puis un second groupe de trois représentants de la société civile, notamment le journaliste politique et animateur de télévision Armando Manocchia, directeur d'Imola Oggi et créateur-présentateur de l'émission Piazza Libetà, diffusé chaque samedi soir sur la chaîne ByoBlu TV, très suivie par la société civile italienne, Lorenzo Maria Pacini, professeur de philosophie politique à l'Université Unidolomiti de Belluno, Stefano Vernole, chercheur en géopolitique et responsable des relations extérieures du Centre d'études eurasiatiques et méditerranéennes et directeur adjoint de la revue EURASIE. Du côté politique, l'eurodéputé Sergio Berlato (parti Fratelli d'Italia, le plus grand parti italien), l'eurodéputée Francesca Donato (indépendant, groupe politique italien DC) ; le député Dimitri Coin (parti Lega), membre de la Commission des affaires étrangères de la Chambre des députés ; l'ancien député Vito Comencini (Lega), également membre de la Commission des affaires étrangères de la Chambre, font tous partie – à l'exception de Donato - des forces actuellement au pouvoir en Italie. Cette rencontre a convergé dans l’appel à se réunir et à réfléchir dans le cadre d’un « Front du sens commun» qui transcende les partis et les idées politiques, et plus tard au niveau de réunions entre plusieurs représentants politiques de l'Union européenne, et qui a vocation à œuvrer en faveur de la paix dans le cadre d’initiatives diplomatiques nouvelles qui font suite à celles déjà lancées par la Chine, le Vatican, la Turquie, Israël ou le Brésil. L’urgence est en fin de compte de lancer des pourparlers de paix pour tenter de résoudre le conflit entre la Russie et l'Ukraine*.

 

Les vraies questions à se poser face à la guerre en Ukraine, une « guerre civile continentale »

Le problème à affronter est précisément un conflit, celui d'Ukraine, qu’Armando Manocchia a défini comme une Guerre civile européenne (pour paraphraser le grand historien allemand Ernst Nolte, auteur d’un ouvrage éponyme publié dans les années 2000), plutôt qu'une « guerre entre États » ou une simple « invasion » russe, comme les médias occidentaux l'ont présentée de façon certes pas fausse, mais réductrice, car l’analyse des conflits géopolitique est par nature complexe et « multiexplicationnelle ». A partir de là, trois séries de questions se sont posées :

1. À quoi ressemblerait l'Occident s'il avait cessé depuis les années 1997 de rejeter de manière anachronique et même de chasser de manière masochiste depuis 2014-2022 la nation la plus grande et la plus riche en ressources (la Russie) du Continent, cella qui fait historiquement et culturellement partie intégrante de l'Europe depuis des siècles ? de là, la question connexe : pourquoi renoncer à une disponibilité abondante de ressources stratégiques venues d'Orient qui, jointes aux remarquables capacités technologiques de l'Occident, apporteraient le bien-être au monde entier, dans le plein respect de la Nature et de la planète qui nous accueille ?

2. Quelle pourrait être une stratégie ou une ligne politique qui amènerait toutes les parties à construire ensemble un Occident uni dans l'harmonie et la paix, ceci certes une fois le conflit ukrainien terminé ? Et pour atteindre ce but apparemment utopique, comment convaincre les dirigeants américains que si l'Europe avait de meilleures relations avec la Russie, elle pourrait continuer tout de même à entretenir d'excellentes relations avec les États-Unis d'Amérique ? Sachant que l'Europe n'a ni intention ni intérêt à choisir ou à favoriser l'un par rapport à l'autre et que les Américains et les Russes eux-mêmes, en tant que peuples, préféreraient être en parfaite harmonie ?

3. Y a-t-il de nombreux politiques qui, dans leurs parlements respectifs, sont prêts à travailler pour ce résultat et qui contribueraient à former un Front du sens commun qui conduirait l'Italie et l'Europe à construire avec les Américains et les Russes et tout l'Occident un avenir meilleur dans l'intérêt du monde entier ?

Le député. Dimitri Coin, fort de son expérience au sein de la commission des Affaires étrangères de la Chambre, a utilisé un terme, « l’Europe géographique », ensemble qui comprend la Russie et l’Europe occidentale et centrale, donc une Europe complète qui serait la première économie du monde. Il a souligné que le président russe Vladimir Poutine avait tenté cette approche depuis le début des années 2000, également grâce à l'initiative du Premier ministre italien de l'époque, Silvio Berlusconi, hélas, sans que cela ne soit jamais compris côté occidental et même européen, étant données les pressions anglosaxonnes et atlantistes qui voyaient la Russie poutinienne comme une continuité de l’URSS donc à endiguer, et même à encercler en profitant de sa faiblesse stratégique et de son chaos dû à la transition post-soviétique. Coin en conclut, à la lumière du grand retour en arrière comme aux pires temps de la guerre froide,  et sachant que les financements octroyés par les institutions européennes sont utilisables comme armes de chantage et de contrôle politico-stratégique sur les États membres, comme on le voit avec les punitions contre la Hongrie, que l'Union européenne en tant que sujet géopolitique en devenir, est en train de devenir un protectorat américano-atlantiste, une évolution qui a fait intégrer l’UE non pas dans un processus de dialogue avec la Russie qui tendait la main alors, mais dans un dispositif de neocontainment anti-russe visant à terme au démantèlement du pouvoir poutinien et de la Russie non-alignée, comme cela est devenu toujours plus évident depuis les révolutions de couleurs de 2005 et de 2013-2014 appuyées par les Etats-Unis et l’Union européenne. Ceci a hélas été pris par le Kremlin comme une menace existentielle qui a conduit à la situation actuelle.

 

Que faut-il donc faire ? 

Sachant que le véritable enjeu et défi du futur est la Chine, que les dirigeants américains considèrent comme leur véritable danger, et que l'attaque contre la Russie via l'Ukraine, destinée à être démembrée par quelques voisins voraces, avait but pour initial d’affaiblir l'allié russe de Pékin (voir rapports de la Rand Corporation), les politiques européens lucides se rendent compte de plus en plus clairement que ce jeu se fait au détriment de leurs propres peuples et nations. Dès lors, M.Coin confirme que seul un peuple dignement informé peut réagir et se faire respecter par les puissants, redonnant ainsi force et noblesse à la bonne politique donc au Bien commun. 

De son côté, l'ancien député Vito Comencini estime que le conflit en Ukraine a été en fait « voulu » par d'autres nations et pas seulement par la Russie, qui voyaient même dans la Russie poutinienne renaissante post-marxiste-léniniste un héritier historico-culturel de l’Empire romain d’orient et donc une réalité identitaire européenne qui devenait tout aussi gênante (un « reproche vivant ») que son potentiel en ressources naturelles et en puissance militaire puisque cette force civilisationnelle, économique et terrestre de la Russie souverainiste et multipolariste allaient menacer existentiellement l’Hégémon américain par l’indépendance stratégique et la richesse en énergie, en étant notamment capable de rendre l'Allemagne et l'Europe totalement autonomes par rapport aux Etats-Unis et aux alliés du Golfe des Anglo-saxons. M. Comencini a toutefois précisé qu’il ne confond par les peuples et les gouvernants, car la majorité du peuple américain n’est pas naturellement contre la Russie et ne souhaite pas cette guerre, un conflit qui a été en fin de compte voulu par un État Profond américain (« deep State ») lié aux multinationales au interventionnistes démocrates tout aussi « globalistes » par opposition aux républicains trumpistes isolationnistes. Pour Comencini, l'hypocrisie consistant à définir de "nazis" précisément ceux qui ont combattu, chassé et vaincu le nazisme en 1945, et qui le font encore aujourd'hui, contrairement au reste de l'Occident, est curieuse et choquante, même, et rappelle la façon dont les pays de l’OTAN ont « nazifié » les Serbes-yougoslaves dans les années 1993-1999 pour détruire la souveraineté serbe et yougoslave et bâtir une base américaine -au Kosovo mafieux, après avoir réhabilité les pires nationalistes croates-bosniaques-albanais pourtant vrais héritiers décomplexés (comme les Ukrainiens nationalistes pro-OTAN de Azov et admirateurs du collaborateur des nazis Stepan Bandera en Ukraine aujourd’hui) des forces de l’Axe durant la seconde guerre mondiale. Les tentatives du premier gouvernement de M. Conte (parti 5 étoiles) de faire de l'Italie le médiateur dans le conflit ukrainien ont été, en toute logique atlantiste, écrasées dans l’œuf. Récupérer ce rôle de médiateur est à présenter difficile, mais cela vaut la peine d’essayer, et l’Italie en est la plateforme d’initiative. Comencini note enfin que si l’argument présenté aux opinions publiques européennes pour justifier l’envoi d’armes en Ukraine et les sanctions contre Moscou est que cela permettrait de terminer la guerre plus vite  et d'affaiblir la Russie, c'est tout le contraire qui s'est en fait produit comme l’horreur de cette guerre qui dure le prouve chaque jour… 

 

Mieux aurait valu éloigner la Russie de la Chine en l’associant à l’Occident plutôt que d’unir ces deux puissances à force d’endiguer et de refouler Moscou

Quant à lui, l'eurodéputé Sergio Berlato a déclaré au début de son intervention : « J'ai toujours été convaincu qu'il fallait tout faire pour permettre à la Russie d'entrer en Europe, plutôt que de s'y opposer et de la forcer à finir dans les bras des Chinois. Ce serait un succès géopolitique, mais nous aurions aussi résolu les problèmes d'approvisionnement énergétique, et nous aurions un partenaire commercial au moins efficace. Le conflit russo-ukrainien, né en 2014, et non pas en 2022, avec des milliers de victimes innocentes, a été permis par un gouvernement absolutiste ukrainien qui a été établi avec un coup d'État voulu par les États-Unis, et ceci n'est pas le vrai choix de l'Europe, mais d’une Europe devenue le paillasson des États-Unis". Les mots sont forts, et le député de poursuivre : « La position prise aujourd'hui par l'Europe n'est pas seulement myope, c'est une position MASOCHISTE, car il est dans l'intérêt de l'Europe d'imposer la paix sur le continent européen. Bien sûr, ce n'est pas dans l'intérêt des Américains… Pour être honnête, le vrai ennemi de la Russie n'est pas l'Ukraine, mais certainement l’OTAN, qui a touché tous les pays européens. Il faut donc rechercher la Paix, coûte que coûte !»

Enfin, l'eurodéputée Francesca Donato a donné un vrai coup de fouet à la discussion, avec une analyse très fine et réaliste sur les difficultés à réagir face à un système fort envahissant et désormais consolidé. Mais elle entrevoit justement de l'espoir en observant une opinion publique américaine qui pourrait influencer le locataire de la Maison-Blanche, en l'amenant par exemple, en vue des élections présidentielles de novembre 2024, à prendre en compte les protestations croissantes contre le soutien à l'Ukraine, ce qui contredirait ainsi les positions des pays européens eux-mêmes tenues au dernier G7 d'Hiroshima et qui étaient tous alignés sur la ligne précédente contre la Russie et la Chine de façon plus radicale encore que les Etats-Unis…Donato a ainsi prévenu que la ligne politique américaine n'est pas immuable et que si les dirigeants européens ne sont pas plus prudents et "moins royalistes que le roi", ils se retrouveront avec une bombe explosive à la main lorsque M. Biden, pour ne pas perdre les élections, finira par reculer..., jouant tout à coup le "pacifiste". MM Donato a d’ailleurs défini Mme Von der Layen comme l'exemple classique du "tapis" qui se couche devant les Etats-Unis et elle a décrit les différents groupes parlementaires européens contrôlés en fait de facto par des sujets pro-OTAN et foncièrement hostiles à la Russie, donc qui empêchent de promouvoir la paix continentale. Nous devrons par conséquent selon elle profiter du revirement éventuel de Washington pour obtenir des changements en notre faveur, ce qui permettra de ce fait de faire taire les « corbeaux » stationnés en Europe. Or l’eurodéputée est convaincue que l'OTAN ne peut pas être dissoute, du moins pour le moment, car la quasi-totalité des pays européens ne dispose pas d'une armée décente pour remplacer l’Alliance, ce qui fait courir à l’Europe un grand risque pour sa sécurité et son indépendance. Selon elle, toutefois, l'OTAN ne serait pas vraiment impliquée en Ukraine, alors que les États individuels qui concluent des accords bilatéraux avec Zelenski le sont de façon évidente. Au contraire, d’après le professeur Lorenzo Maria Pacini, l'OTAN est le principal instrument de puissance des États-Unis en Europe, et maintenant aussi dans le monde, d’où la nécessité d’en finir avec cette structure. M. Pacini a rappelé quant à lui les racines historiques et culturelles séculaires unissant la Russie et le reste de l'Europe, jusqu'à il y a un siècle, ceci incluant même la dimension de parenté avec les autres maisons dirigeantes du continent. 

 

La guerre entre l’Occident et le « système multipolaire »

D’après lui, comme d’après nombre d’analystes géopolitiques, l'affrontement d'aujourd'hui est dû à une guerre contre le système multipolaire, avec des armes, y compris financières, qui conditionnent tout et tout le monde. Il conseille que si : « on essayait de regarder vers l'est, on comprendrait qu'il y a la possibilité de s'affranchir d'une domination, sans toutefois se placer sous une autre domination ». Lorenzo Pacini observe ainsi que «Le problème vient du fait que nous ne sommes plus habitués, en tant que peuple italien et en tant que peuples européens, à développer cette participation politique qui appartenait surtout aux décennies passées, quand il y avait une passion, parfois même dangereuse ou conflictuelle, mais qui manifestait cependant un intérêt direct pour la légitimation des formes politiques ». De ce point de vue, selon lui, le fait d’être devenus « accros » à une délégation fiduciaire des intérêts européens à des tiers, ceci sans contrôle, a finalement tout permis, à notre détriment. Et ceux qui pilotent fort efficacement cela sont des Etats et des multinationales qui font partie du monde anglo-saxon, c’est-à-dire à partir de l’Outre-Atlantique et du Royaume-Uni ». La simple existence depuis des décennies du réseau d’espionnage économique, sécuritaire et politique Echelon, devenu PRISM, qui réunit les services de renseignements et ministères de la défense de 5 pays anglosaxons, appelés « 5 eyes », pour espionner l’humanité, y compris des pays « amis », au bénéfice de la National Security Agency (NSA) américaine, qui collecte les datas de l’ensemble du monde grâce aussi à la coopération des grandes multinationales digitales (GAFAM), n’est qu’une illustration parmi d’autres de cette réalité.

Dans son allocution, le docteur Stefano Vernole a décrit le point de vue américain selon lequel « une Europe puissante et autonome, grâce à la Russie, n'est pas acceptable pour les USA, et lorsque que Donald Trump a tenté a contrario d'attirer la Russie dans l’espace occidental et de la détacher de la Chine, il a été remplacé par un candidat du système plus "obéissant" et conforme, Joe Biden ». Tout a donc été fait en sorte qu’il se crée un mur entre la Russie et le reste de l'Europe, de même avec la Chine. « Durant la crise du COVID 19, le cas particulier des seuls vaccins admis qui étaient ceux de l’Occident a été en fin de compte un acte clair de géopolitique et de géoéconomie tout sauf sanitaire »….

 

Du « piège de Thucydide » entre la Chine et les Etats-Unis au cas ukrainien

Pour ne pas tomber dans le soi-disant «piège de Thucydide», face à la fois à la Chine et à la Russie, l'objectif principal du conflit ukrainien est, d’après les stratèges américains et atlantistes, d'évincer Vladimir Poutine dont l'orientation eurasienne clairement affirmée ne pouvait que nuire aux intérêts des puissances américaines fortes. Pour l’expert géopolitique Stefano Vernole, il est faux d’affirmer, comme on l’entend souvent dans les médias occidentaux, que l'OTAN n'aurait pas joué un rôle fondamental dans la crise ukrainienne. Le propre secrétaire général de l’OTAN, M. Stoltenberg, s'est d’ailleurs lui-même vanté à plusieurs reprises que l'OTAN avait non seulement favorisé le coup d'État de Kiev en 2014, mais surtout formé l'armée ukrainienne pendant huit ans, précisément pour la préparer au conflit contre la Russie, et ensuite, depuis février 2022, pour faire la guerre. L'influence idéologique anglosaxonne des gouvernements ukrainiens s’est confirmée avec Zelenski, lequel n’a pas du tout été élu comme un candidat anti-russe au début, mais qui, sous la pression de l'OTAN, a dû prendre de plus en plus parti en faveur d’un conflit avec la Russie. L'Otan est en fait selon lui profondément impliquée dans ce conflit : « de nombreux mercenaires parmi ceux envoyés du monde entier combattre les Russes en Ukraine sont en fait des soldats des pays de l'Otan sans uniforme national et enregistrés comme "volontaires".

 

Quel rôle pour l’Italie ? 

Comme l’a dit l’eurodéputé Donato, il est vrai que l'Italie ne peut pas jouer un rôle d’intermédiaire neutre comme la Turquie ou même la Hongrie, parce qu’elle n'a pas la force suffisante, la masse critique et le niveau politique, culturel, économique et social, pour devenir un véritable médiateur, ceci d’autant qu’elle accueille le plus grand nombre de bases américaines en Europe… Tant qu'il y a cette occupation militaire, l'Italie a selon lui très peu de marge d'action… Cependant, l'Italie pourrait former un intergroupe de parlementaires qui, avec de nombreux représentants de la société civile, pourraient agir en tant que porte-paroles des Italiens et des peuples européens pour exiger la fin du conflit ukrainien, ou au moins un cessez-le-feu, tout en soutenant les efforts diplomatiques déjà lancés par la Chine, le Vatican et le Brésil. La confirmation selon laquelle l'opinion publique des peuples peut avoir un grand poids, Armando Manocchia informe que des signatures sont actuellement recueillies en Italie par les citoyens, conformément à la constitution italienne qui permet de faire abroger une loi par référendum si une pétition recueille plus de 600 000 signatures, dans le but de faire abroger la loi qui a permis l'envoi d'armes à l'Ukraine. La motivation peut être résumée par un célèbre aphorisme de l'historien britannique Arnold Toynbee, cité par Armando Manocchia: "Les civilisations meurent par suicide, pas par meurtre". « Et si l'humanité existe encore, c'est parce que, lorsqu'elle est en danger, elle a la capacité de faire prévaloir la sagesse et le bon sens ».

 

*Le compte-rendu de ce colloque est consultable dans son intégralité (environ 1h40) en vidéo sur la chaîne YouTube POLIS ETICA : https://youtu.be/ovR5qxhAiSc