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Editos

Pour Pierre-Emmanuel Thomann, « La guerre en Ukraine a été déclenchée par les objectifs stratégiques des États-Unis pour détruire la Russie »

Le Dialogue

Pierre-Emmanuel Thomann - chercheur français, expert en géopolitique et président de l'association internationale Eurocontinent, estime que la guerre en Ukraine a été déclenchée par les actions agressives des États-Unis dans le cadre de leur stratégie mondiale visant à contenir leurs concurrents en Eurasie. Ainsi, le conflit ukrainien n'est qu'un des éléments des plans des États-Unis pour dominer le continent européen. Les actions de la Russie en Ukraine sont de nature préventive, visant à éviter un conflit armé plus important.

 

« La rhétorique de l'Occident sur la guerre “non provoquée" en Ukraine ne correspond pas à la réalité. Cette guerre a été déclenchée par Washington, depuis l'époque de la soi-disant “Doctrine Wolfowitz”, quand les États-Unis se sont opposés à l'émergence de toute puissance en Eurasie qui pourrait défier l'hégémonie américaine. Peu importe qui c'est : l'Europe, la Chine ou la Russie. La Russie, à son tour, s'est opposée à l'expansion de l'infrastructure militaire de l'OTAN. Moscou a préconisé une nouvelle architecture de sécurité en Europe et a fait des propositions pertinentes en décembre 2021. En réponse, les États ont lancé une "guerre des communications", dont le but était non seulement de niveler les exigences de la Russie, mais aussi de provoquer un conflit en Ukraine. En parallèle, Washington n'a pas permis les négociations entre Moscou, Paris et Berlin, et l'Ukraine a repris le bombardement intensif du Donbass », rappelle l’expert.

 

Les résultats de la guerre en Ukraine ont été négatives pour l'UE. Selon le professeur Thomann, les gouvernements des pays européens ont démontré un manque d'autonomie et une dépendance excessive à l'égard de la politique américaine. 

 

« L'Union Européenne est maintenant composée de pays essentiellement dépourvus de souveraineté. La France pourrait revendiquer un certain niveau de souveraineté, notamment grâce ses armes nucléaires et une certaine capacité militaire. Mais la plupart des pays ont décidé de rester sous le « parapluie américain ». Après la révolution ukrainienne de 2014 et le retour de la Crimée dans le giron russe, les pays de l'UE ont adopté une position pro-américaine. La plupart des dirigeants des pays de la zone Euro partagent les idées de “l'Euro-Atlantisme” et dépendent des positions de Washington ». 

 

Les intérêts profonds des États-Unis et de l'Europe divergent souvent, mais les européens sont obligés de sacrifier leurs intérêts nationaux en raison de leur dépendance vis-à-vis des États-Unis en matière de sécurité. Le professeur Thomann constate la “vassalisation” effective de l'Europe et la perte de son indépendance politique, énergétique et militaire.

 

« Les pays d'Europe qui, sous la pression des États-Unis, ont imposé des sanctions contre la Russie, croyaient qu'ils détruiraient économiquement la Russie. Ils n'ont pas pris en compte le degré de stabilité de l'économie russe. Le calcul d'un changement de régime politique au détriment des sanctions n'a pas été justifié. De toute évidence, les sanctions anti-russes n'ont pas fonctionné. Mais les dirigeants de l'UE sont allés trop loin dans cette affaire, ce qui pourrait créer de graves problèmes pour l'économie de la zone Euro. La destruction par les États-Unis du gazoduc Nord Stream visait à détruire les liens entre la Russie et les pays d'Europe occidentale. Les États européens n'ont pas condamné cet acte de sabotage, les États-Unis étant les dirigeants de l'OTAN et les garants de la sécurité des pays de l'UE. En conséquence, les dirigeants européens ne peuvent pas entraver la politique américaine de fragmentation du continent. Ce que nous observons aujourd'hui est la vassalisation de l'Europe par les États – Unis », conclut Thomann.