Un nouveau livre de l'historien Ahmed Youssef
Le 1er octobre prochain paraîtra aux éditions Lyre de Mercure à Paris le dernier ouvrage de l’écrivain, journaliste et membre de l’Académie scientifique d’Égypte, installé à Paris, Ahmed Youssef.
Ce livre révèle l’histoire méconnue du tableau controversé « L’Origine du monde » du célèbre peintre français Gustave Courbet. Son destin fut façonné par sarelation avec le diplomate égyptien Khalil Chérif Pacha, commissaire de la délégation artistique égyptienne à l’Exposition universelle de Paris en 1855 . Ce dernier est le commandaire du fameux tableau de Courbet : " l'origine du monde" .

L’ouvrage de Ahmed Youssef met en lumière la situation politique de Khalil Chérif Pacha (Le Caire 1831 – Istanbul 1879), qui fut élève de l’École militaire égyptienne fondée à Paris par Mohammed Ali et son chef d'état major Soliman Pacha d'un côté, et le gouvernement de Louis Philippe d'un autre, et ce selon un accord unique dans l’histoire des relations entre nations.
Cette école avait pour président le maréchal Soult, grand chef des armées napoléoniennes, et pour directeur scientifique Edme-François Jomard (1777–1862), surnommé « le dernier des Égyptiens », dernier survivant de l’expédition française en Égypte et professeur de Rifâ‘a al-Tahtâwî. Jomard fut surtout le maître d’œuvre de la publication monumentale de la Description de l’Égypte.
Khalil Chérif Pacha ne fut pas seul dans cette école : il y côtoya celui qui allait devenir khédive d’Égypte, Ismaïl Pacha, ainsi que les fils de Soliman Pacha. Une vive rivalité opposa alors à Paris les deux élèves, Ismaïl et Mohammed Chérif. Lorsque Ismaïl accéda plus tard au pouvoir, Khalil Chérif Pacha — qui avait choisi de résider à Paris — s’impliqua dans une grave conspiration politique visant à l’évincer et à empêcher la réalisation du projet du canal de Suez.
Devenu ambassadeur de la Sublime Porte à Paris puis à Saint-Pétersbourg, Khalil Chérif Pacha dut se défaire du tableau, dont la réputation circulait dans les milieux politiques parisiens. Il le vendit avec le reste de sa collection lors d’une célèbre vente aux enchères en 1867, dont le catalogue fut préfacé par le grand écrivain Théophile Gautier.
Khalil Chérif Pacha épousa la princesse Nazli Fazil, fille du prince Moustafa Fazil, farouche rival du khédive. À la mort de Khalil Shérif pacha, l’Égypte refusa qu’il y soit enterré ; il fut inhumé à Istanbul. Au même moment, Gustave Courbet, exilé en Suisse après s’être opposé à l’empereur Napoléon III — jusqu’à sa chute après la guerre contre la Prusse en 1870 —, s’était engagé personnellement dans la guerre civile connue sous le nom de Commune de Paris, où il trouva sa perte.
Comme si une malédiction politique poursuivait le tableau de Courbet . Staline puis Hitler tentèrent de s’en emparer. Disparue pendant la Seconde Guerre mondiale, l’œuvre fut retrouvée chez les enfants du célèbre psychanalyste français Jacques Lacan, qui la cédèrent à l’État français. Aujourd’hui, elle est exposée au Musée d’Orsay à Paris, où elle est surnommée « la seconde Joconde ».